Conversation 66435 - L'électricité Chabbat, c'est permis ?

Shyd
Samedi 10 novembre 2012 - 23:00

Par rapport à l'électricité pendant shabat, me semble t il que les ah'ronim s'accorder pour dire que ce n'était pas une Tulda de eshe ,mais ils raportaient l'electricite à la melah'a de hamake bepatishe et ils rapportent la dessus la mah'loket sur le portail d'une clôture :a savoir dans l'instant ou j'ouvre est ce que c'est comme ci j'avais détruis la clôture ? lorsque je ferme le portail est ce comme ci je finaliser la clôture et donc la melah'a de hamake bepatishe?ce a quoi la Guemara répond que la nature du portail et d'être ouvert et fermé .
Dans un circuit électrique l'électricité est toujours présente la nature de l'interupteur est d'être ouverte et ferme ce qui nous porterai à croire que c'est permis!?
En Israël étant donné que h'evrat hah'ashmal fait travaillé des juifs comme des non juifs on ne pourrait utiliser l'électricité ,mais étant donné que toute les infrastructures hospitalière marche à l'électricite il y'a pikuah' nefesh donc l'électricité serait elle permise?

Emmanuel Bloch
Lundi 12 novembre 2012 - 11:55

Chalom,

La question de l'electricite a suscite de nombreuses techouvot des plus grands rabbanim, et differents travaux interdits ont ete avances pour "classifier" l'utilisation de l'electricite. Le 'Hazon Ish a fameusement declare que l'utilisation de l'electricite est en fait interdite a cause du travail appele "Boneh", construire. D'autres constructions etaient possibles et preconisees, et pas tout le monde admettait que l'interdit etait deorayta, mais de nos jours il est admis que la halakha interdit l'utilisation de l'electricite, quelle que soit la definition exacte de la melakha.

Il existe des cercles en Israel qui refusent d'utiliser l'electricite de la Hevrat ha'Hachmal (ceux qui suivent le Hazon Ish, precisement). Ces cercles ont alors des generateurs prives pour leurs besoins en electricite du chabbat.

psg
Dimanche 11 novembre 2012 - 23:00

J'ai eu un reve : apres 1 siecle de reflexion, les rabbanim se reunissent a nouveau et reviennent sur leur decision d'interdire l'electricite Shabbat.
Finalement les quelques rabbins ( minoritaires certes) qui l'avaient autorise dans un premeir temps, avaient raison.
Resultat ? on pourrait affirmer sans hesitation qu'aujourd'hui 75 % des juifs respecteraient Chabbat, grace a l'autorisation de l'electricite et ainsi, le Messie viendrait.
Cette Torah-fiction, pour etre un peu simpliste n'en est pas moins une vraie reflexion sur l'interdit de l'electricite qui "empeche" les traditionnalistes d'etre Chomer Chabbat selon la Halakha.
Apres 1 siecle de recul, peut-on continuer a affirmer que dans le geste d'appuyer sur un interrupteur, il y a une melakha de Construire ? ou de terminer un travail ?
Est-ce-vraiment une decision, un Psak Halakha "eclaire" ?

Emmanuel Bloch
Mardi 13 novembre 2012 - 08:31

Chalom,

Vous etes donc le Martin Luther King des juifs orthodoxes, si je vous suis bien :)

Pour vous repondre, il faut se replacer dans le contexte historique. Lorsque les premiers poskim durent trancher la question de l'utilisation de l'electricite le chabbat, il n'etait pas du tout evident que, sur la simple base des normes halakhiques disponibles, il faille l'interdire, ou alors certainement pas dans tous les cas.

Dire que fermer un circuit electrique revient a faire un acte de construction n'est pas du tout evident a priori. Le 'Hazon Ish, qui est a l'origine de cette approche, le savait d'ailleurs bien, et encourageait ses disciples a "renforcer" sa position par tous les moyens possibles (pour plus de details, voyez dans ce livre: http://www.magnespress.co.il/website/index.asp?id=3564.

Si l'interdit ne repose pas sur une lecture evidente des sources, il faut chercher ailleurs. Car que signifie un chabbat avec l'electricite ? Qu'il est possible de faire chauffer facilement de la nourriture, de regarder la television ou d'ecouter la radio, de faire de la lumiere et de l'eteindre, etc. En d'autres termes, cela changerait completement l'ambiance du chabbat, la maniere dont il a traditionnellement ete vecu pendant des siecles. La ou nos ancetres devaient trouver des moyens pour garder la nourriture chaude, pour s'eclairer, etc., nous n'aurions plus de probleme; alors qu'ils chantaient des zemirot, nous ecouterions la radio; etc.

En d'autres termes, chabbat ne serait plus chabbat. C'est probablement un profond sentiment d'un devoir, le devoir de maintenir l'ambiance du chabbat et son role au sein du peuple juif, qui a pousse les poskim a rechercher comment lire l'utilisation de l'electricite a la lumiere des normes halakhiques deja existantes. Avec une approche restrictive, certes, mais qui permet de sauvegarder le principal - chabbat kodesh !

joel
Mercredi 19 décembre 2012 - 23:00

Chalom,
Suite Cheela [66482 - 66435],
Dans vos réponses vous expliquez pourquoi on ne peut pas utiliser directement l'électricité le shabbat (selon le 'hazon Ish notament).
Une plata qui se serait branché avant chabbat peut servir pour maintenir un plat au chaud.

Il y a cependant un question qui me taraude : l'utilisation de l'eau shabbat.

Personne (à ma connaissance) m'interdit d'ouvrir un robinet d'eau froide le shabbat. Pourtant, si l'on regarde en détail la distribution de l'eau, on se rend compte que l'eau que l'on utilise provient des chateaux d'eau. Si l'on habite une maison, l'eau y parvient par gravite (l'eau dans le chateau étant plus haute que la maison). Mais l'eau dans le chateau d'eau, elle y monte comment ? avec des pompes ... qui sont certainement électriques.
Donc quand j'ouvre mon robinet, le chateau d'eau se vide et finit par déclencher une pompe électrique qui va remplir le chateau d'eau...

On peut surement comparer cela avec mon réfrigérateur. Sauf que le frigo, meme si je n'ouvre pas la porte, finit par se déclencher à cause des pertes de chaleur du à l'enceinte.
Dans le cas du chateau d'eau, l'eau ne s'échappe pas toute seule, elle ne coule que quand j'ouvre mon robinet.

Question : peut on ouvrir son robinet d'esu froide le shabbat? Y a t il une différence si l'on habite en France (pays ou la majorité de la population en non juive) ou en Israel?

Merci pour le temps que vous nous consacrez.

Emmanuel Bloch
Mardi 25 décembre 2012 - 10:27

Chalom,

A ma connaissance, l'utilisation de l'eau froide pendant chabbat est permise car elle combine un certain nombre de particularites permettant un psak din "permissif":

1. L'electricite est en pratique consideree par la plupart des poskim comme un interdit derabanan, en tout cas tant qu'il n'y a pas production de chaleur ou de lumiere (dans ces 2 derniers cas, il y a des melakhot deorayta clairement impliquees).

2. La consommation de l'eau est un safek (doute), car il est impossible de savoir quand le reservoir d'eau de l'immeuble atteindra le point ou il sera suffisamment vide pour enclencher la pompe qui va le remplir.

3. Il s'agit d'un "grama" (une action indirecte), car on n'appuie pas directement sur un bouton. Il y a une etape intermediaire dans l'utilisation de l'electricite - la consommation d'eau.

Donc, il s'agit en pratique d'un safek grama derabanan, ce qui est en principe moutar. Mais un rabbin de Bnei Brak a defraye la chronique il y a environ un an en prenant une position restrictive: http://www.ynetnews.com/articles/0,7340,L-4175443,00.html

J'ignore sur quelle base il se basait pour interdire. La halakha demeure toutefois inchangee, et l'utilisation de l'eau froide pendant chabbat est permise, sauf pour les disciples de ce rabbin specifique.

FunkyJonat
Dimanche 6 janvier 2013 - 23:00

Bonjour,

Pour faire suite au récent fil de discussion sur l'eau et l'électricité (questions 66482 et 66980 notamment), je me permets deux questions :

Pour l'eau, quid de la mela'ha de otsaa, de déplacer d'un domaine à l'autre: car l'eau était dans le domaine public, et en ouvrant le robinet, j'ai l'intention et j'arrive à la faire pénétrer dans mon reshout, non ?

Pour l'electricité, pourriez-vous expliquer, même succinctement, sur quoi repose l'assimilation de l'électricité à Boné (Esh, on pense à l'étincelle, Maké BePatish a été expliqué par la question 66435), mais Boné ?

Pour l'electricité, enfin, vous expliquez " En d'autres termes, cela changerait completement l'ambiance du chabbat, la maniere dont il a traditionnellement ete vecu pendant des siecles. La ou nos ancetres devaient trouver des moyens pour garder la nourriture chaude, pour s'eclairer, etc., nous n'aurions plus de probleme; alors qu'ils chantaient des zemirot, nous ecouterions la radio; etc. " J'imagine que vous aviez autre chose en tête que cet argument qui semble uniquement procéder d'un esprit conservateur loin de vos réponses habituelles !

D'une part, dire 'je fais comme ça car mes parents, qui pensaient ceci, l'ont fait, quand bien même je sais maintenant que leur postulat de départ est faux" me semble étonnant, et en définitive peu fidèle à leurs valeurs et aux objectifs qu'ils défendaient.

D'autre part la beauté, la sainteté, l'unicité du shabbat ne réside pas (seulement) dans les efforts investis pour garder la nourriture chaude et s'éclairer, non ? Car sinon, l'invention de la plata et de la minuterie a ruiné toute possibilité de passer un authentique shabbat ! En effet, programmer la minuterie demande à peine plus d'effort que d'allumer sur un interrupteur !

Au final, je crois comprendre ce que vous voulez dire : la fée électricité a changé la donne, on vit dans un nouveau quotidien. Et dans ce nouveau paradigme, les juifs ont conçu une façon de vivre le shabbat, qu'il ne convient pas de bouleverser après 150 ans sans craindre que cela n'entraine d'autres débordements. Je peux comprendre cela. Mais comment fonder juridiquement une telle décision ? Dire "ce n'est pas shabbatique d'écouter la radio, c'est plus sympathique de chanter en coeur Menou'ha veSimh'aaaaaaaa Or laYehoudiiiiiiim" ne suffit pas vraiment ;-)

Bien cordialement,

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Question envoyée via l'application iPhone

Emmanuel Bloch
Mercredi 16 janvier 2013 - 14:11

Chalom,

Je reponds aux differentes questions dans l'ordre :

1. L'eau que l'on fait couler en ouvrant dans le robinet ne se trouvait pas dans le domaine public. Elle se trouvait dans des tuyaux souterrains, ce qui signifie qu'elle etait dans un Makom Patour ("endroit libre"). Transferer d'un Makom Patour a un domaine prive est parfaitement admis.

2. L'utilisation de l'electricite le chabbat a ete interdite par differents poskim, qui l'ont assimilee a differents travaux : 1) Allumer / Eteindre (mavir / mekhabeh), 2) Cuire (mevachel), 3) Donner le dernier coup de marteau (makeh bepatich), 4) Creer quelque chose de nouveau (molid).

En outre de cette discussion sur la source de l'interdiction, il existait une discussion sur le niveau de l'interdit : deorayta ou derabanan ? Le rav Chlomo Zalman Auerbach, dans un livre redige dans sa jeunesse (Meorei Esh), a ainsi defendu que les appareils diffusant de la chaleur, de la lumiere ou la voix etaient interdits deorayta, mais les autres etaient completement permis (ascenseur, ...), meme derabanan.

Le Hazon Ish intervint dans cette discussion alors qu'elle etait deja relativement avancee. Dans sa psika, il admet que l'utilisation de l'electricite le chabbat est interdite pour certaines des raisons mentionnees ci-dessus, mais il *ajoute* un nouvel argument : boneh (construire) / soter (detruire). Voyez ses arguments dans Hazon Ish, Orah 'Hayyim 50.

(De maniere interessante, il faut noter que le Hazon Ish n'etait pas le tout premier a defendre cette these; le rav Ouziel, premier grand rabbin sepharade d'Israel, avait deja avance l'argument de "boneh", mais peu de gens avaient suivi cette idee jusqu'a ce que le Hazon Ish la reprenne independammant, et elle maintenant associee au nom de ce dernier).

Affirmer que l'electricite est interdite a cause de la "construction" va beaucoup plus loin que de s'en tenir a l'idee de combustion ou de cuisson. Ce n'est plus la chaleur ou la lumiere causees par l'electricite qui sont en cause, mais le fait meme de fermer un circuit electrique est desormais vu comme une nouvelle "construction". La distinction operee par le rav Auerbach, et d'autres, entre les machines degageant de la chaleur et de la lumiere, et les autres ne le faisant pas, tombe instantanement. Pour le Hazon Ish, *toute utilisation de l'electricite* est interdite deorayta. C'est une grande 'houmra qu'il introduisit la et qui fut largement debattue par de nombreux talmidei hakhamim de l'epoque, qui n'etaient de loin pas tous d'accord avec le Hazon Ish.

C'est donc l'acte de fermeture du circuit electrique, assimilee a l'assemblage d'un ustensile (ou son desassemblage pour la reouverture du circuit), qui est mise en cause par le Hazon Ish.

3. Pour plus de details, je me permets de vous renvoyer a ce livre dont j'ai tire les references que je cite :
http://www.magnespress.co.il/website_en/index.asp?id=3564#aaa (pp. 566-580).

Vous y trouverez notamment aussi des extraits d'une interview que l'auteur a realisee aupres d'un ancien eleve proche du Hazon Ish. Cet ancien eleve cite son maitre comme ayant dit "imagine seulement - aujourd'hui, quand tout marche avec l'electricite, si nous permettons l'electricite, aurons-nous encore un chabbat digne de ce nom ?"

C'est cet argument que j'ai essaye de rendre dans ma precedente reponse. Il ne s'agissait pas de se montrer conservateur ou novateur, mais d'expliquer ce qui s'etait passe il y a environ 80 ans en Israel. Donc, au-dela de la halakha propre, il y a le sentiment du possek et de l'homme religieux. Certaines choses sont impossibles, interdites, et le possek le sent instinctivement, avant meme d'exprimer son sentiment dans le langage de la halakha. En l'espece, chabbat a toujours ete un moment privilegie, une retraite spirituelle pour laquelle il fallait se preparer : nourriture, lumiere, etc., tout demandait de la reflexion et une organisation. L'electricite menacait de changer tout cela, et donc de changer l'ambiance generale de ce mini-monde futur qu'est le chabbat. Elle etait a proscrire, sous peine de perdre l'ambiance toute particuliere du chabbat telle qu'elle avait ete vecue par des generations de juifs.

Alors, oui, on trouve des arguments halakhiques, sinon le travail du possek n'est pas accompli. Ils sont plus ou moins convaincants, c'est selon. Mais il n'empeche que dans ce genre de cas, l'ideologie et les valeurs du decisionnaire jouent un role immense dans sa prise de position. C'est ce que je voulais souligner.