Conversation 71870 - La lèpre en clair...

elkaim
Mercredi 2 octobre 2013 - 23:00

kvod arav,

Il y a deux choses dans la Tora,ou il y a un miracle dévoilé quand ces cas se présentent:la SOTA et le METSORA;
ma question va sur ce 2eme cas .Pourquoi ce cas (lachon ara) suscite-t-il un miracle ? La main de Moché lors de sa première rencontre avec Hachem a bien été atteinte d'une tsaraat ?pourquoi ? Est ce parce qu'il a dit à Hachem que le peuple ne le croirait pas si il se présentait comme l'envoyé de D'? Que disent les mefarchims la dessus ?

Rav Samuel Elikan
Vendredi 6 décembre 2013 - 03:51

Shalom,
Votre question est bonne, mais on pourrait également demander pourquoi la Sotah requiert un miracle ? L'équilibre conjugal (shalom bayit) et la médisance (lashon hara) sont deux valeurs importantes...
Quant à Moshé, il avait besoin d'un miracle pour Pharaon, c'est en tout cas ce que dit le texte. Je vous invite cependant à une réflexion sur le sujet que j'avais noté il y a de cela plusieurs années.

Les niveaux de lèpre
Le lépreux était touché à trois niveau, premièrement sa maison est atteinte, puis ses vêtements et finalement son corps. Cependant, ces trois niveaux, la peau de l’homme, ses habits, et son habitation marquent un manque dans ceux-ci qui peut être réparé ; c’est-à-dire que D’ieu, Infini et Intègre, nous donne la possibilité de réparer notre monde, de tendre vers l’Infini, chose qui parfois, dans son dynamisme a une valeur plus grande que le statique de l’Infini, c’est pourquoi nous sommes créés de matière.

La peau
La source de la blessure de la peau réside dans l’histoire d’Adam et H’ava. Ils étaient nus et seulement après avoir désiré du fruit interdit par D’, ils durent voiler leurs organes génitaux. En effet, le désir et l’attrait sont basés dans la volonté de «manger» tant au propre qu’au figuré (1). Se recouvrir devient alors l’expression de la honte qui les recouvre, ils n’ont pas su répondre de ce qu’on attendait d’eux (2).

La réparation de cette faute ne se fera que plus tard, au temps d’Avraham, alors que l’humanité est arrivé à un point où, un homme au moins, est capable de sanctifier ses (im)pulsions et de marquer sa peau de ce principe : ne pas vivre selon ses désirs uniquement : la mila (circoncision).

Le vêtement
Le dégât de l’habit a été premièrement causé par les frères de Yossef qui ont trempé sa tunique unique en son genre dans le sang pour dire à leur père que celui-ci était mort, chose qu’il a interprété comme accident « il a été attaqué par une bête sauvage » (3). L’habit (beged), comme nous l’avons déjà expliqué, est l’expression extérieure de l’homme, parfois sincère, parfois trompeuse (begida). Les tzitziot sont l’expression de ce vêtement identitaire qui sait rappeler aux Juifs leur identité et devoirs, marquant aussi la protection Divine qui nous entoure (4).

La demeure
La plaie de la maison a commencé en Egypte, dans notre premier exil, lorsque nous avons remplacé notre Terre et nos maisons par celles de la terre de Goshen où nous avons pu nous reproduire en grand nombre (5), sans être resté lié à notre Terre. La réparation à cette faute est le commandement de la mezouza marquant la sainteté résidant dans la maison. Ainsi, notre maison nationale ne peut être qu’Israël, lieu du Temple, de la Sainteté et aussi de la Prophétie, il n’y en a pas ailleurs qu’en Israël (6). Nos Sages marquent cela dans une expression forte : « quiconque est enterré en Israël, c’est comme s’il était enterré sous l’Autel (du Temple – lieu très saint) » (7).

Le fil triangulaire
Il est intéressant de noter que ces trois choses, l’alliance de la mila qui est un signe (‘ot), tout comme les tefilin (8), avec les tzitzit et la mezouza entourent l’homme de sainteté et de Présence Divine (9). Les deux sources de la lèpre sont soit une volonté impulsive de dire du mal d’autrui, soit la perte de valeurs morales (souvent liés à une haute estime de soi-même, ou à un état d’esprit peu raffiné, pour le dire gentiment)(10). La mila marque l’humilité et la morale (11), alors que tzitzit et mezouza symbolisent la nécessité de s’entourer de sainteté et de ne pas laisser les forces de la vie nous envahir.

Kol touv

Sources:
(1) Cf. Bereshit 39:6 et Rashi, id. – le talmud nous dit aussi, dans ce même sens, que nos Sages à une certaine époque ont réussi à annuler le désir d’attrait, mais y ont renoncé, car il n’y avait plus à manger, les poules ne pondaient plus d’œufs, etc.
(2) Cf. Rav S.R. Hirsch, dans comm., ibid.
(3) Cf. Bereshit 37:33
(4) Cf. Bamidbar 15:39
(5) Cf. Bereshit 47:27
(6) Cf. Meh’ilta, intro. à parashat Bo.
(7) TB Ketouvot 111a, cf. le reste de la page où il y a encore de nombreuses expressions similaires.
(8) Cf. TB Pesah’im – c’est pourquoi à Shabat et pendant les fêtes on ne met pas les tefillin, car ceux-ci sont aussi des signes (‘ot hi ledorotam brit olam).
(9) Zohar III, 265a ; cf. encore Sh. Ar. O.H. 25, 2 avec Mah’atzit Hashekel (s.v. kèn hou bazohar) et Mishna Beroura.
(10) Cf. Rashi sur Vayikra 14:4
(11) Cf. Rambam, Guide des Egarés III, chap. 49 ; Stern, Ta’amei Hamitzvot, p. 87-107.

elkaim
Dimanche 5 janvier 2014 - 23:00

Kvod arav,

concernant votre réponse à ma question 71870 concernant le metsora,vous dites que la personne est touchée par cette affliction,d'abord par ses vêtements,ensuite sa maison et ensuite sa personne .Mais il me semble que ce n'est pas forcément dans cet ordre.Puisque la parcha Tazria parle d'abord de la touma d'une personne,et ce n'est que dans metsora que l'on ne parle de la lèpre des murs de la maison ? y a t'il forcément un ordre ou l'affliction peut toucher indifféremment en premier un de ces trois éléments ?

Rav Samuel Elikan
Lundi 6 janvier 2014 - 15:22

Shalom,
Votre question est traitée par le Rav Abarbanel (11ème question) et il arrive à la conclusion que les habits et la peau sont liés l'un à l'autre et son "naturels" (liés au niveau de l'homme), alors que la maison a besoin d'une "kapara" (expiation) et elle est liée à ses habitants. Selon ces propos, il semblerait effectivement qu'il n'y ait pas d'ordre précis et qu'il s'agisse de phénomènes différents. Toutefois, ce n'est pas l'avis de tous les commentateurs.
Il est à noter que depuis la destruction du second Temple, il n'y a plus de lèpre sur la maison et les habits (Rambam, hil. toumat tzara'at, chap. 12-16), ces questions ne sont donc pas (encore ?) d'actualité.

Cordialement,