Conversation 79242 - Cheheh'yanou pour tefilines neuves ?!

matsanutella2
Lundi 30 novembre 2015 - 23:00

Bonjour
Pourquoi on ne recite pas chéhéyanou sur des tefilines neuves ?

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Question envoyée via l'application iphone

Rav Samuel Elikan
Mercredi 2 décembre 2015 - 04:36

Shalom,

Vous posez une très bonne question.

A laquelle la réponse n'est pas évidente.

En effet, il n'est pas évident qu'il ne faille pas dire chéhéh'yanou sur des tefilines neuves.

Nos Sages enseignent dans la Tossefta (enseignements des Tanaim qui n'ont pas été incorporés dans la Mishna - Berah'ot 6,15) que quiconque achète un talith neuf ou des tefilin neuves doit dire chéhéh'yanou.

C'est également ainsi que tranche le Rambam (hil. Berah'ot 11,9), le Radbaz (resp. (basé sur les manuscrits), §5) et après eux le TaZ (OH 22, s.k. 1) et d'autres encore (tels le Olat Tamid, rapporté par le Eliyah Rabba, ainsi que le Gaon de Vilna, dans leur comm. sur le Sh. Ar. ad loc) - cf. encore Be'our Halah'a id. s.v. kana.

Toutefois, le Tour et le Shoulh'an Arouh' (OH 22) ont volontairement omis le cas des tefilin et ne parlent que d'un nouveau talith pour lequel on doit dire chéhéh'yanou.

Le Beit Yossef (ad loc) explique au nom de son maître le Mahari Abouhav, que l'on ne récite cette bénédiction que dans un cas ou un situation/acquisition nouvelle nous procure de la joie, lorsque ce n'est pas une mitzva, mais lorsqu'il s'agit d'un commandement on bénit uniquement pour les choses qui se produisent à un certain temps (comme les fêtes).
C'est-à-dire que les commandements comme le loulav et le shofar par exemple qui sont liés aux fêtes et donc à une certaine "innovation" du temps - alors, on peut remercier D'ieu de ce "renouvellement".
Par contre pour les autres commandements - non, car les commandements ne sont pas donnés pour "en profiter".

Le Rav Tzvi Pessah' Franck (Har Tzvi OH I §21) soutient que le fait que la raison à cela soit que mitzvot ne sont pas données pour "profiter" (mitzvot lav leheinot nitnou) induit que par conséquent lorsqu'on met le Talith, selon le Tour et le Shoulh'an Arouh', on ne le met pas en temps que "commandement", mais en tant que vêtement.
En tant que tel, ce n'est pas différent de l'achat d'un nouvel habit, c'est pourquoi l'on récitera chéhéh'yanou.
Par contre, pour les tefilin, il n'y a pas de moyen de les mettre comme "vêtements", puisque toute leur essence réside dans le fait qu'il s'agit bien d'un commandement et donc lorsque l'on accomplit un commandement qui n'est pas lié au temps, on ne récite pas chéhéh'yanou (excepté pour la Brit Mila (selon Sh. Ar. YD 265,7) et le Pidyon HaBen).

Selon cela, dit-il, il se peut bien que lorsqu'il fait très chaud et que quelqu'un ne met le talit que pour la mitzva, il se peut qu'il ne doive pas réciter cette bénédiction.
Quoi qu'il en soit, le Rav Tz.P. Franck conclue que cela reste un vêtement et on bénira.

L'Aroh' HaShoulh'an (OH 22) soutient que le Rambam pensait aussi de la sorte, sauf qu'il ne voyait pas de différence entre le talith et les tefilin - les deux sont des acquisitions qui réjouissent et donc on récite chéhéh'yanou sur eux, car pourquoi le talith serait-il plus un vêtement que des tefilin ?
Ce ne serait, selon cette explication, donc pas lié au fait que ce soit une mitzva, car l'on ne dit pas chéhéh'yanou sur une mitzva qui n'est pas liée au temps, comme dit, mais plus le fait que "ça se porte" comme un vêtement, chose qui peut procurer un certain plaisir, la première fois du moins.

[cf. encore resp. Yabia Omer IV OH 50; resp. Yeh'ave Da'at II, §31; resp. LeHorot Nathan II, §9]

Cordialement,