Conversation 26780 - Dissequer les corps

juliamyriam
Jeudi 10 novembre 2005 - 23:00

pourquoi la dissection sur des corps morts est interdite
est-elle meme interdite pour des étudiants en medecine ?

merci d'avance
cordial chalom

Rav Elie Kahn z''l
Vendredi 26 mai 2006 - 16:39

Chalom,

La question de la dissection de corps pour l'étude de la médecine a fait l'objet d'études dans la littérature halakhique depuis le 18ème siècle, mais a été traitée de manière plus approfondie depuis le 20ème siècle.
Bien que certains rabbins aient autorisé, l'opinion la plus répandue était que cela était strictement interdit.
Nous ne pourrons pas dans le cadre de Cheela nous livrer ne serait-ce qu'à une étude même succincte de cette question sur laquelle ont été écrits, sans exagération aucune, des centaines d'articles.
Les raisons pour lesquelles la majorité des rabbins a interdit la dissection de corps, même dans le cadre d'études de médecine sont les suivantes. Je vous fais ici l'"inventaire" d'une partie des arguments qui ont été évoqués, en me basant sur l'article qui traite de ce sujet dans l'encyclopédie halakhique et médicale (en hébreu) du Professeur Avraham Steinberg (tome 4). Notons qu'il s'agit d'arguments cités par différents auteurs. Ils ne font pas l'unanimité.
1. Sainteté du corps humain, même détaché de l'âme.
2. L'âme du mort souffre des avatars du corps, même après sa mort.
3. Il est interdit de déprécier le corps humain et de l'abaisser.
4. Il y a une mitsva d'enterrer les morts.
5. Il faut enterrer les morts dans la journée?
6. Il est interdit de tirer profit d'un mort.
7. C'est assimilable à un vol.

Il faut noter que concernant les dissections en faculté de médecine en Israël, plusieurs décisionnaires ont autorisé. Il s'agit entre autres du Rav Ouziel, qui était GRAND Rabbin d'Israël, du Rav Herzog, lui aussi Grand Rabbin, du Rav Goren lui aussi Grand Rabbin. Le Rav Weinberg, un des grands décisionnaires du milieu du 20ème siècle, a analysé dans une lettre adressée à un rabbin, vice-ministre du gouvernement israélien, les raisons qui peuvent pousser à interdire (Thumin, 12, page 382).
Ce que j'ai retenu de très intéressant dans sa lettre, c'est que l'on ne prend les mêmes décisions halakhiques quand cela touche des individus ou quand cela touche une société entière ou un état.
Un état moderne, voulant protéger ses citoyens, et se doter de structures médicales modernes ne peut se passer d'un tel moyen, et il est donc primordial d'autoriser, si cela est possible.
Il est marquant de noter que les rabbins qui ont autorisé étaient justement des rabbins pour qui le challenge de trouver l'harmonie entre la Tora et la modernité, et celui de permettre à un état juif de ne pas s'éloigner de la Tora, étaient une base de travail.

De facto, dans les universités israéliennes, les étudiants en médecine font des dissections, y compris les étudiants religieux, et je suppose donc que les voix des rabbins les autorisant ont été entendues.