Conversation 39514 - Ton prochain non juif

Pilpel harif
Dimanche 25 novembre 2007 - 23:00

Shalom 'aleykhem,
Quelle est la source de l'interprétation du verset ואהבת לרעך כמוך comme "tu aimeras ton prochain juif comme toi-même" et non pas le sens littéral "tu aimeras ton prochain comme toi même"? Ya t-il des ma'hloqot à ce sujet? Et pourquoi d'autres commandements sont eux par contre appliqués à son prochain juif comme non-juif, comme l'interdiction de voler ou de tuer?
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Dr Michael Ben Admon
Lundi 14 janvier 2008 - 12:40

Shalom,

Dans la Torah, differents termes hebraiques designent l'autre', le prochain:
'rea' - prochain, ami
'a'h' - frere
'amit' - confrere
'ezra'h' - citoyen
La litterature talmudique va interpreter ces termes et leur conferer a chacun un sens bien specifique. Ils vont ainsi definir l'alterite de l'autre d'une facon bien specifique.
Ainsi, 'a'h' qui designe le frere biologique va egalement englober le frere ethnique. Le terme a'h designe donc l'identite ethnique et toute personne qui ne fait pas partie du collectif ethnique n'est pas a ranger dans la categorie du 'a'h'.
Le 'rea', quant a lui, qui parait designer l'autre sans differenciation aucune est compris par les Sages du Talmud comme le representant de l'identite religieuse. Le 'rea' est tel que Maimonide le resume - רעך בתורה ובמצות, ton semblable dans l'accomplissement des commandements. Toute personne qui est porteur d'une alterite religieuse ne fait donc pas partie de la categories des 're'im'.
Le verset, 'tu aimeras ton prochain comme toi-meme' ne s'applique donc qu'a ceux qui portent la meme identite religieuse; Aux autres, non. La question est de savoir si cette identite religieuse signifie adherance au systeme et un juif non religieux mais croyant sera un 're'a'; ou alors, uniquement celui qui accomplit les commandements concretement sera considere comme 're'a', et les autres - juifs et non-juifs confondus, ne le seront pas.
Pour ma part, je pense que la majorite des textes talmudiques optent pour la seconde lecture. Une des preuves en faveur de cette these est l'integration du 'guer toshav' dans cette categorie.
Cette differenciation tres claire dans le Talmud va disparaitre dans la litterature post-talmudique. Celui qui en changera consciemment le sens, au vue des problemes de morale que ceci peut entrainer face au monde non-juif, est Rabbi Menahem Hameiri de Perpignan. Il demontrera que le terme 'a'h' - frere - est a etendre a toute l'humanite de part l'humanite commune. Egalement, le terme 're'a' - prochain - designera a present toute personne qui accepte la loi morale elementaire, c'est a dire l'humanite civile.
Le rapport du juif a l'autre varie donc en fonction du temps, de l'endroit, des besoins identitaires du peuple juif. Au vue de ces identites seront egalement errigees les categories de l'alterite religieuse et ethnique.