Conversation 6881 - Priorité à soi-même

Anonyme
Samedi 24 mai 2003 - 23:00

Bonjour,
1) Dans quel traité du talmud y a t'il cette question. "etant dans le desert seul avec un autre homme, il ne reste qu'une ration d'eau pour faire vivre l'un deux. a qui dois je donner la ration ? moi ou mon prochain ?" on m'a dit que la reponse est "sois meme" car sinon on aimerait son prochain plus que soit meme et non "aimes ton prochain COMME toi meme" . Mais n'est ce pas dans ce cas aimer moins que soit meme ?
désolé de vous embetez avec des questions basic de gmara.
Merci

Rav Elie Kling
Mercredi 6 août 2003 - 23:00

Dans le traite de Baba Metsia, 62 a, le Talmud rapporte le cas des deux personnes qui se trouvent dans le desert alors que seul l'un d'entre eux possede une gourde d'eau. S'ils partagent l'eau , ils mourront tous les deux. Si l'un des deux en boit, il s'en sortira. Les avis sont partages: pour Ben Petoura, ils doivent partager , ainsi "aucun des deux ne verra la mort de l'autre". C'est alors qu'intervient Rabbi Akiva. Selon lui, l'homme a la gourde doit boire seul. En effet, le texte dit: " Ton frere vivra avec toi" (Vayikra 25, 36). Conclusion de R. Akiva: "ta vie a priorite sur la sienne". Sans doute R. Akiva tire-t-il sa deduction des termes 'avec toi' , ce qui sous-entendrait: et non pas a ta place. La Halakha tranche selon l'opinion de R. Akiva. Il est interessant de rappeler dans ce contexte que c'est le meme R. Akiva qui avait pourtant qualifier le verset "aime ton prochain comme toi meme" comme 'principe fondamental de la Torah'. Pour comprendre l'opinion de R. Akiva, il faut se souvenir que dans le cas qui nous occuppe, il n'y a qu'un homme en danger de mort, celui qui n'a pas de gourde. Obliger l'autre a partager signifierait donc que l'amour d'autrui va jusqu'a l'obligation de se sacrifier pour lui. Ce n'est pas l'opinion de R. Akiva. Comme soi meme ne signifie pas: plus que soi meme. Par contre, imaginons que ma vie soit menacee (ce qui, encore une fois n'est pas le cas du desert), je n'ai pas le droit de me sauver au prix de la vie de l'autre. Ainsi, si on exige que j'assassine autrui en me menacant de mort si je n'obtempere pas, j'ai l'obligation de me laisser tuer plutot que de tuer l'autre. Il s'agit la d'une Halakha classique a laquelle adhere bien evidemment R. Akiva. N'oublions pas non plus que, dans la tradition juive, ma vie ne m'appartient pas. Je n'en suis que le depositaire et ne peux donc en faire ce que bon me semble (ce qui explique l'interdiction du suicide). C'est donc a la Halakha de statuer dans quel cas faut-il se sacrifier et dans quel cas cela est interdit.
Cordial chalom