Conversation 42340 - Détester Hachem ?
Chalom,
A t-on le droit de detester Dieu?
Il ne s'agit pas que d'un sentiment de dégout, d'une injustice mal vécue. Mais d'une situation d'acharnement qui dure et ne s'explique pas, d'une vraie douleur intérieur qui a sa logique.
Ce n'est pas une révolte générale a propos de tout ce qui ne va pas dans le monde. C'est l'amertume d'une situation personnelle.
Ne me répondez pas, s'il vous plait, que ne connaissant pas la situation, vous avez du mal à répondre au probleme.
Ce dégout ne remet pas en cause l'existence de Dieu, ni la validité des épreuves qui ont pour but de nous élever.
Comment prier Dieu avec ça dans la gorge? ça opere forcement une dissociation, entre l'intervention de Dieu dans la vie personelle, et le Dieu d'Israel, Celui à qui on s'adresse dans la prière.
A t-on le droit de prier Dieu dans un sidour, si on arrive plus à lui parler dans son coeur ?
Alors evidemment, ce n'est pas Dieu qui a un probleme, c'est celui qui vous pose ces questions.
Comment calmer la révolte? Résignation, esperance niaise ?
Nous n'avons pas tous la carure des grands maitres, qui tombent mille fois, et qui se relevent le sourire aux levres pour replonger la tete dans le Talmud.
Nombreux sont ceux qui, après la Schoah, se sont mis à détester Hachem, réaction condamnable certes, mais explicable à la lumière de nos malheurs.
Sans aller jusqu’à Le haïr, beaucoup de grands Maîtres, notamment dans les mouvances hassidiques, en sont venus à se plaindre de Lui, et même parfois à vouloir Le traduire en justice.
Je recommande à ce sujet la « Célébration hassidique », un ouvrage d’Élie Wiesel.
Suite de la question 42340
Et aussi le "Procès de Shamgorod" de ce même Elie Wiesel qui se demande si Dieu est coupable ou victime de sa création.
La pièce a été magnifiquement mise en scène l'année dernière lors du Festival des Cultures Juives à Paris par Catherine Lévy.
Je vous remercie de votre remarque.
Ref question 42340
Pardon jai mal cliquer sur ma derniere question qui est parti trop tot.
Je demandais comment calmer sa révolte qui parait bien orgueilleuse pour ceux qui ne sont que cendres et poussieres, mais pour qui le monde a été créé.
Je ne sais pas si ça fait une difference, mais en 45, l'horreur était pour tous. Ce qui est dur, bien que moindre c'est evident, c'est de voir autour de soi des évolutions sans cesse, et de stagner encore et encore.
Cela ne créé pas vraiment une haine de Dieu, mais une "désillusion" qui engendre une distance. Dieu se cache encore. Et ça c'est pour tout un chacun. Doit-on attendre Machiah plus pour le monde entier que pour nous meme?
Je vous remercie d'avoir répondu à mes questions, en attendant Wiesel,
Chalom,
Le témoignage suivant, rapporté par le Rabbin Aryeh KAPLAN (« Si vous étiez Dieu », Editions EMOUNAH), éclaire le sens que l’on peut donner à la révolte contre Hachem :
« L’un des plus grands maîtres juifs de notre génération, le Rabbi de Klausenbourg (Klausenburger Rebbe), a perdu sa femme, ses enfants et sa famille dans les camps nazis et il a lui-même passé deux ans dans l’enfer d’Auschwitz. Il en a pourtant émergé pour ramener au judaïsme toute une génération de rescapés, pour fonder une communauté à New York, puis une autre en Israël.
J’ai souvent entendu cette éminente personnalité évoquer les camps de la mort et ceux qui y ont péri. J’ai trouvé dans ses propos des larmes et de la tristesse, mais jamais une mise en question. Car c’est bien d’un tsaddiq qu’il s’agit, dont l’esprit pénétrant voit bien au-delà de l’immédiat. Lorsque l’on considère ce qui forme l’Ultime, alors vraiment il n’y a pas d’interrogations.
Le plus important est de nous rappeler que Dieu est le Bien ultime et que, par conséquent, même le pire sera un jour transformé en bien (Rabbi Moché ‘Hayyim Luzatto, Kela‘h pit‘hei ‘hokhma, 2). L’homme peut faire le mal, mais ce mal qu’il fait sera lui aussi racheté par Dieu pour être transformé en bien. Le Talmud nous enseigne que nous devons dans ce monde bénir Dieu tant pour le bien que pour le mal, mais que, dans le monde à venir, nous nous rendrons compte qu’il n’existe rien d’autre que le Bien (Pessa‘him 50a). »
On peut retenir de ce témoigne que la « révolte » contre Hachem peut s’exprimer, chez le Juif croyant, par des larmes et de la tristesse, mais jamais par une mise en question. Cette révolte-là, loin de constituer une manifestation d’orgueil, est au contraire un acte de foi.