Conversation 42903 - Le judaïsme et l’homosexualité

Sophistication
Jeudi 10 juillet 2008 - 23:00

A la suite d'une fort longue discussion que j'eus avec un séminariste récemment, par laquelle une multitude de points vue vinrent à se mesurer les uns aux autres, de nombreuses interrogations concernant la méthode d'analyse qu'il faut employer pour comprendre la Bible, ainsi que la nature même du texte sacré, ont troublé ma relative certitude. Aussi, ne trouvant nulle part d'éléments de réponses à la hauteur du trouble qui me secoue, me suis-je persuadé que le recours à des lumières plus savantes, les vôtres en l'occurrence, serait la plus sage décision à prendre. Et je suis plein de reconnaissance à l'idée que vous me fassiez l'honneur de prendre le temps de lire, voire de répondre à ma question.

Ce trouble dont j'ai déjà parlé prit forme à la suite d'une méthode d'analyse qui remit à elle seule la crédibilité de la Bible en question. Je veux parler de la façon dont le rabbinisme moderne analyse le passage ô combien discuté du Lévitique
où l'homosexualité est condamnée comme une pratique détestable. Celui-ci, et j'ose m'en faire le porte-parole le temps d'une question, le comprend de la façon suivante: le peuple élu étant alors engagé dans une guerre, il fut de la responsabilité de tous de procréer et d'assurer de la sorte une subsistance au peuple lui-même, la naissance de guerriers étant nécessaires. Or, c'est tout là le problème que je me pose. Si, bel et bien, la Bible s'analyse dans un contexte et se comprend comme prenant racines dans un peuple, une époque, une mentalité, comment peut-on l'élever à l'absolu ? Comment peut-on faire d'un message divin, qui doit forcément être intemporel et immanent de l'essence divine, puisque, justement, il doit s'adresser aux générations qui l'ont vu naître comme aux millions d'autres qui suivront, en ce compris nous-même; comment donc peut-on faire d'un message divin le reflet d'une société et, de ce fait, analyser un livre éternel à travers le prisme de la société dans laquelle il est né ? Si réellement cette façon d'analyser était exacte, cela voudrait-il impliquer que des pans entiers de la Bible devrait être mis de côté par les lecteurs modernes, car n'ayant plus raison d'être dans les circonstances actuelles ? Ou bien, au contraire, nous étant trop éloignés des circonstances dans lesquelles il est né, devons-nous nous résigner à lui attribuer toute crédibilité?

Vous le voyez, ces interrogations jettent le discrédit sur l'analyse à prendre (car, je le répète, l'analyser dans son contexte sous-entendrait qu'il est un texte temporel, sujet nécessairement à l'amputation de certaines de ses parties ,lesquelles nous sont inutiles) et consécutivement, sur le texte lui-même (car, un texte d'essence divine qui s'adresse à l'humanité toute entière et à jamais, devrait porter en lui la Constance -, assurance que toutes les générations prieront le même Dieu et le même texte,- et l'Atemporalité - assurance qu'un texte est divin et voué à être écouté à toute époque).

Ma détresse est grande. Bien que par ma foi je continue de percevoir le Divin au travers de mes prières, je me trouve seul avec moi-même, le livre auquel je me référais ayant été remis en question. Je ne doute pas que cette question ait été posée avant moi, mais j'espère néanmoins que vos lumières sauront dissipés le nuage de doutes qui planent au-dessus de ma tête.

En vous remerciant du travail considérable auquel vous vous adonnez, il faut l'avouer, avec grande science, acceptez, je vous prie, mes sentiments distingués.
F.D.

Jacques Kohn z''l
Dimanche 13 juillet 2008 - 02:18

L’interdiction de l’homosexualité masculine qui a été formulée dans Lévitique 18, 22 et dans Lévitique 20, 13, et celle de l’homosexualité féminine qu’en ont déduite les rabbins, sont parmi les corollaires de l’interdiction des pratiques sexuelles en honneur en Egypte (Lévitique 18, 3).

Parmi les raisons de cette interdiction, on peut citer ce qu’en a écrit rabbi Moché Feinstein (Igueroth Moché Ora‘h ‘hayyim 4, 115) : Les pulsions humaines sont nécessaires, mais elles doivent être maîtrisées. Etant donné que les pulsions homosexuelles sont dépourvues de tout but et de toute finalité, elles ne peuvent pas être tenues pour des pulsions légitimes. C’est pourquoi, estime-t-il, la véritable motivation du comportement homosexuel ne peut être qu’un acte de rébellion contre Hachem, un désir de transgresser un interdit, accompagné parfois de la volonté inavouée de se mutiner contre Lui.

Le judaïsme, a écrit Immanuel Jakobovits, grand rabbin du Royaume-Uni, n’accepte pas l’idée selon laquelle l’homosexualité doit être considérée uniquement comme une maladie ou comme un comportement moralement neutre. Aucune éthique hédonique, même si on l’appelle « amour », ne peut justifier l’homosexualité, pas plus qu’elle ne peut absoudre l’adultère ou l’inceste, qui prétendent eux aussi se placer sous le signe de l’amour et du consentement mutuel.