Conversation 1975 - Que penser du clonage?

Anonyme
Mardi 8 octobre 2002 - 23:00

Quelle est la position du judaisme sur la question du clonage de l'homme et du clonage therapeutique?

Rav Benjamin David
Dimanche 22 décembre 2002 - 23:00

La réponse à cette question n'est pas encore complète, mais voici un début de réponse que je complèterai plus tard bli nédér.

CLONAGE ET HALAKHA
Rav Benjamin David

La naissance de la brebis la plus réputée du monde (Dolly) par clônage embryonnaire, a fait couler beaucoup d'encre. Des dizaines d'articles d'ordre moral et bio-éthique sont parus dans les journaux. Nos rabbanim sont restés quelque peu en retrait face à cette polémique car, d'une manière générale, nos décisionaires rabbiniques ne traitent que les questions pratiques qui leurs sont adressées et non des questions théoriques d'ordre philosophique ou moral. Ce type de débat correspond plutot à l'étude du Rosh Yéshiva qui approfondit les textes talmudiques et essaie d'en tirer un enseignement théorique et général sur les grandes questions de la vie. Cependant plusieurs articles ont déjà été publiés par nos sages, mais ces écrits ne sont pas des psak halakha (décision rabbinique) qui ont force de loi, mais plutôt des essais d’une approche générale au sujet. Cet article résume les différentes idées prononcées dans ces publications.

Le principe du clônage dans les écrits de nos sages :

La possibilité de créer un être par d'autres moyens que par la fusion d'une gamète mâle et d'une gamète femelle, a déjà été envisagé par nos rabbanim du Moyen Age. En effet le Rambam dans le Séfer Hamitsvot ( mitsvot négatives, 179) exprime que seules, "les petites gens" croivent que la conception ne peut s'effectuer que par la rencontre d'un mâle et d'une femelle. Alors que ceux qui connaissent la torah savent qu'il y a d'autres types de création.
Un autre rabbin médiéval, de la région de Provence, commentateur du Talmud, le Méhiri, imagine cette possibilité (commentaire sur le traité de Sanhédrin 67B) . Il en conclut que toute manipulation qui va selon les principes naturels de la biologie n'est pas considérée comme une sorcellerie. Et sur ce, il nous donne un exemple : "Même s'ils réussissaient à créer de belles créatures sans relations entre les sexes , comme il est envisageable selon les livres de Sciences Naturelles, cela serait autorisé, car tout ce qui est naturel n'est pas considéré comme sorcellerie".
Selon ces rabbins, l'éventualité de la création d'un enfant par clônage ne remet donc pas en question notre croyance en D… Cette possibilité a déja été enfouie dans la nature par D. dès le départ .

Jusqu'où l'homme peut-il s'ingérer dans les affaires divines :
Peut-on créer des êtres par des moyens artficiels et changer le parcours de la création et peut-être même sa nature?

Le Midrach Tanehouma semble inciter l'homme à être actif dans la conception du monde :
Turnusropus, dit “le mauvais”, questionna Rabbi Akiva: “De qui les actions sont-elles meilleures? De D… ou des hommes?
Rabbi Akiva lui répondit : “Ce sont les actions des hommes qui sont plus significatives!”
Rabbi Akiva lui apporta comme preuve des gerbes de blé et du pain: “Que préfères- tu manger, le produit des hommes ou celui de D…?”

Selon ce même esprit, Rabbi Yéhouda Alévy explique dans le livre du Kuzari (livre 1 paragraphe 35) que l'homme diffère de l'animal par le fait qu'il doit effectuer sans cesse une réparation de ses vertus personnelles, une réparation au niveau de sa vie familliale et une réparation au niveau de la société dans laquelle il vit.
L'homme doit donc être actif afin de faire changer et améliorer son entourage très proche et lointain. Il est responsable de ses actes et de l'avenir de l'univers.
Ce même enseignement est rapporté au nom du Gaon de Vilna qui aurait interprêté le verset de la torah: "D… bénit le 7ème jour et le proclama saint parce qu'en ce jour il se reposa de l'oeuvre qu'il avait produite pour faire". La fin de ce verset est difficilement compréhensible. Le Gaon explique: Le monde a donc été créé par D…et une continuation doit y être apportée par les humains pour le parfaire.

La position du judaisme face aux nouveautés scientifiques:
Dans le judaisme, les rabbins ne peuvent interdire une technique scientifique sans avoir des sources ou des raisons juridiques, hilkhatiques. La peur du dérapage des scientifiques, qui se serviraient de cette technique à mauvais escient, n'est pas une raison suffisante pour l'interdire totalement. De toute invention dans la nature, nous pouvons sortir du bien ou du mal. Certains pays peuvent se servir de l'industrie nucléaire pour sauver des vies, d'autres pour en supprimer. Le mal ne se trouve pas dans la technique en elle-même, mais dans sa mauvaise utilisation par l'homme. Cela est vrai pour toutes les nouveautés scientifiques. C'est à notre société de fixer les limites d'utilisation de ces techniques selon les valeurs morales prônées par la torah. Si l'application de ces technologies n’est que néfaste pour l'humanité, alors les rabbanims en interdiront l’utilisation.
Il en est de même pour le clônage. Si l'application de cette technique est bénéfique, par exemple que ce soit la seule solution pour un couple d'avoir des enfants, on ne peut l'interdire. Mais si cette pratique est mise au service de couples d'homosexuels afin qu'ils fondent une famille ensemble, le clônage sera interdit.

Le clonage des âmes:
La guémara dans le traîté de Nida nous enseigne qu'il y a trois associés dans la conception d'un enfant : le père, la mère et D… Les parents donnent la matière première qui constituera le corps de l'enfant. Pour sa part, le divin lui influra le soufle de vie, le néfech, et lui donnera une dimmension encore plus spirituelle propre à l'homme (qui se distingue par cela de l'animal), la Néchama, l'âme. Le clônage d'embryons n'est en fin de compte qu'une "fabrication artificielle" de l'enveloppe extérieure de l'humain, une reproduction parfaite de son corps. Mais ce sosie n'est pas une copie conforme de l'être qui a été cloné, puisque ce clone a sa propre âme personelle, sa propre personnalité, ses propres devoirs et obligations envers la société et ses propres droits. Son existence n'est pas dépendante de l'homme dont les cellules ont été prélevées. Dans la nature, le phénomène du clônage se retrouve dans les vrais jumeaux, puisqu'ils proviennent du même ovocyte fécondé qui s'est partagé en deux. Ces deux frères ont le même potentiel génétique. Ils se resemblent extérieurement, mais ils ont chacun leur propre personnalité et sensibilité. Leur âme, essence divine de l'individu, est différente. Si l'être produit de ce clônage a sa propre identité, qu'il est conscient et intelligent, qu'il peut distinguer entre le bien et le mal et qu'il a par cela un libre arbitre, il sera donc considéré comme humain à part entière. Dans ce cas il n'y a aucun problème au clônage. Cependant qui peut nous garantir que ce clône aura toutes ces facultés qui sont le propre de l'homme? Quelles surprises nous attendent dans l'avenir?

La mitsva de soigner: Vérapo Yérapé
La torah autorise l'homme à soigner les autres. Cela est même considéré comme une mitsva. Toute intervention qui permet de prolonger ou/et de rendre meilleure la qualité de vie d'un patient est considéré comme bénéfique. Par contre une intervention qui provoquerait la mort ou l'aggravation de l'état de santé du malade sera interdite. Selon cette définition, il semble à première vue que le clônage soit considéré comme positif puisqu'il permet de créer une vie. Cependant cela n'est pas si simple. Si notre homme clôné a une espérance de vie plus courte qu'un être humain ou qu'il souffre de malformations ou de déficiences physiques ou mentales, l'acte de clônage sera alors considéré comme cruel et néfaste, et donc interdit par la torah. Dans ce contexte il est possible que cet acte soit interdit pour le moment, selon les connaissances actuelles de la médecine, et qu'il soit autorisé dans un futur proche après que les techniques aient réussi à surmonter les problèmes et inconvénients biologiques.

Le clonage risque de poser des questions d'ordre juridique:
Qui est considéré comme étant le père juridique de ce clône. Doit-on considérer que l'individu sur lequel la cellule a été prélevée est le père juridique? Ou bien que la paternité ne se définit seulement que par le biais du spermatozoïde? Si le medecin prélève chez un homme azoospermique une celulle de son nez qui sera clônée dans l'ovocyte de sa femme, cet homme est-il le père de l'enfant né ( nez) de cette union?
Si une celulle a été prélevée chez un embryon et qu'elle soit clônée dans un ovocyte qui provient aussi de la mère de cet embryon, et que ces deux embryons soient placés dans l'utérus de leur mère, doit-on considérer que le père et son fils sont en gestation dans le ventre de cette femme, et que le père et son fils naitront au même moment et seront donc aussi frêres jumeaux?
Ces absurdités nous entraînent donc à conclure que la paternité ne peut passer que par l'utilisation de spermatozoïdes d'un homme. Toute créature qui naîtra de la transplantation de noyaux cellulaires sera considérée comme orpheline de père, ou sans père. Le mari de la femme qui portera cet enfant sera considéré comme le père adoptif de cet enfant. C'est ce qui se dégage des propos du Rav Yaakov Ariel. Cependant le père biologique ne sera pas entièrement insignifiant et l'enfant clôné devra le respecter car c'est lui qui lui a donné la vie. D'un autre coté, l'enfant ne pourra pas hériter de la fortune de ce père qui n'a pas vraiment de statut juridique.

A cause de tous ces dilemnes éthiques et de ces doutes juridiques, le Rav Ariel propose de ne pas rejeter complètement le clônage mais d'être méfiant ou plus exactement prudent par rapport à son application et son utilisation. Peut-être faut-il attendre encore les résultats de la recherche avant de pouvoir se prononcer définitivement. Il est possible que la position du judaïsme soit semblable à sa position par rapport aux greffes d'arbres: un juif ne peut pas créer des plantes hybrides, mais si un non-juif le fait, les fruits obtenus sont autorisés à la consommation pour les juifs. Le clônage ne doit pas être développé par les scientifiques juifs, mais il se pourrait que la torah en autorise la jouissance et l’utilisation si elles s'avèrent bénéfiques pour l'humanité.

Anonyme
Mercredi 27 novembre 2002 - 23:00

Quelle est l'opinion de la Thora et la Halaha concernant le clonage?

Rav S.D. Botshko
Dimanche 5 janvier 2003 - 23:00

Le Rav Benjamin David a écrit une longue réponse sur le site taitant de cette question. Elle est extrêmement documentée et je n'ai pas grand chose à ajouter.
Mais, comme vous m'avez adressé cette question personnellement, je me permettrai d'exprimer une réflexion personnelle, mais elle ne représente pas l'opinion de la Thora ni l'opinion des décisionnaires qui ont traité de ce sujet, elle n'est rien d'autre qu'une réflexion.

La conclusion du Rav Benjamin David, qui est sans aucun doute la synthèse de l'opinions des décisionnaires, est la suivante. On peut autoriser le clonage s'il est fait dans un but thérapeutique, c'est à dire règler la souffrance d'un couple qui ne peut pas avoir d'enfants, mais qu'il faut l'interdire dans d'autres cas pour éviter des dérapages dangereux.

De toute façon la question n'est pas une question pratique puisque finalement, il y a peu de chances que l'on puisse empêcher ce progrès par des lois.

La véritable question se posera si le clonage devient réalité. Est-ce qu'un couple malheureusement stérile, respectueux de la Thora, pourra utiliser cette technique pour avoir des enfants.

La réponse rapportée par le Rav Benjamin est significative de l'attitude des sages d'Israël dans tous les temps, toujours attentifs à éviter autant que se peut la souffrance.

Ceci dit, personnellement, j'ai quelques doutes sur la justesse de cette attitude dans ce cas précis.
La Thora nous dit: "C'est pourquoi un homme abandonnera père et mère et s'unira avec sa femme et ils deviendront une seule chair". Cette chair c'est lenfant né de leur union. L'être qui nait est un être nouveau, différent, fruit d'un mélange savant de ce qui est apporté par chacun des époux. Puis y a un troisième "partenaire" si on ose s'exprimer ainsi D-ieu amenant l'âme et c'est ainsi que les sages d'Israël parlent de trois partenaires à la venue au monde d'un enfant.

Il y a dans la nature et également dans la présentation de la procréation par la Thora union entre l'amour et le fait d'avoir des enfants. D-ieu a créé l'instinct qui amène l'homme et la femme à s'unir et c'est ainsi que naissent les générations nouvelles.

L'homme, depuis les temps immémoriaux, fait ce qu'il faut pour séparer ces deux fonctions. Le Midrach nous parle d'hommes qui avaient deux femmes, l'une qu'ils veillaient qu'elles ne deviennent pas enceintes, de peur de porter atteinte à leur beauté, l'autre porteuse d'enfants. La Thora combat cette conception.

Avec les progrès de la médecine, un couple peut avoir des enfants sans relations et avoir des relations sans avoir d'enfants. Cette différenciation est contraire, à mon sens, à l'esprit de la Thora.

On est allé plus loin, lorsque le mari est stérile, la femme devient enceinte avec le sperme d'un autre homme. Le clonage, va plus loin encore, c'est la possibilité d'avoir des enfants sans avoir et un homme et une femme.

Certes, ceux qui ont autorisé l'insémination artificielle ou qui permettront le clonage limitent leur autorisation à des fins thérapeutiques. Mais où est la limite des soins légitimes qu'il faut donner et les interventions qui vont au delà.?

Les sages mentionnent l'autorisation de guérir des malades par ces termes: "de là on apprend que le médecin a le droit de guérir". Que veulent-ils dire par cette expression? Certains expliquent (voir Ramban) que guérir est une intervention dans la volonté du Créateur qui n'est autorisée que parceque la Thora l'a autorisé explicitement. Personnellement, sans aller si lon puisque cette autorisation semble évidente dans cet univers qui a été remis à l'homme, il me semble que nos sages veulent dire que le médecin a le droit de guérir, guérir oui, mais pas de devenir un apprenti sorcier. Par exemple, pas d'acharnement thérapeutique qui ne fait que prolonger des souffrances et pas non plus proposer des solutions qui en fait ne guérissent pas.

En effet, le clonage ne guérit pas le couple puisqu'il ne peut toujours pas avoir d'enfant commun. L'enfant ne proviendra des gènes que de l'un des deux partenaires.
Si D-ieu a refusé des enfants à ce couple, le clonage (tout comme l'insémination par donneur étranger) ne résout pas le problème.

La voie de la Thora me semble être d'assumer cette souffrance et d'utiliser le temps disponible pour se charger de bébés malheureusment abandonnés qui ont besoin d'un couple qui puissent leur servir de parents.

Cheela n'est pas la tribune appropriée pour expliquer dans les détails mon opinion personnelle sur la question. Ce n'est qu'une ébauche. Je conclus en rappelant que ce qui est dit ici ne représente que mon opinion personnelle.

Anonyme
Samedi 28 décembre 2002 - 23:00

LE SUJET DELICAT DU CLONAGE ENTRE DANS L'ACTUALITE .
QUELLE EST LA POSITION DE LA HALAKHA A CE SUJET ?
[ IL CONVIENDRAIT D'EXPLIQUER D'ABORD CE PROCEDE

Rav Benjamin David
Mardi 28 janvier 2003 - 23:00

une réponse détaillée a deja été apporté sur ce site.

Anonyme
Mercredi 29 janvier 2003 - 23:00

Bonjour suite a la question sur le clonage 09.10
je viens de lire dans la presse francaise que les le fameux bebe clone "eve" raelien aurait ete fait en israel
d'apres cette article, Brigitte Boisselier presidente de Clonaid dit il y en auraient beaucoup d'autre.

qu'en pensez vous ??

Rav Benjamin David
Dimanche 2 février 2003 - 23:00

peut être bien oui peut être bien que non!
qui vivra verra!