Conversation 46864 - A propos de la haine gratuite et du Michné Tora

Zellwiller
Jeudi 23 avril 2009 - 23:00

Bonjour,

je prépare un mémoire de recherche consacré à la philosophie religieuse de Hermann Cohen.
Celui-ci évoque la notion de "haine gratuite" (la haine étant toujours sans motif) et parle du Deutéronome comme d'une "récapitulation de la Torah".
Il s'agit apparemment de notions talmudiques.
Pourriez-vous m'en indiquer la traduction hébraïque translittérée ainsi que les références ?

Je vous remercie par avance.
Chabbat chalom.

Jacques Kohn z''l
Dimanche 26 avril 2009 - 01:05

1. Ce que la tradition juive appelle la « haine gratuite » (En hébreu : Sinath ‘hinnom ») désigne l’une des causes de la destruction du deuxième Temple. Cette forme de haine est illustrée par l’anecdote suivante, racontée dans le Talmud :
Un homme avait un ami, appelé Kamtsa, et un ennemi, nommé Bar Kamtsa. Il chargea un jour son serviteur d’inviter Kamtsa à un banquet qu’il donnait en l’honneur des Sages. Mais l’homme se trompa et invita à sa place Bar Kamtsa.
Lorsque le maître des lieux aperçut que Bar Kamtsa était présent, il l’interpella brutalement et lui intima l’ordre de quitter les lieux.
Bar Kamtsa lui répondit : « Etant donné que tu m’as invité, permets-moi de rester, et je te rembourserai la valeur de ce que j’aurai mangé et bu. »
« Non, dit l’autre ! Je veux que sortes de chez moi.
– Je te rembourserai la moitié du prix total du banquet.
– Non, pas question.
– Je te rembourserai le prix total du banquet.
– Non, sors ! »
Le maître des lieux agrippa alors Bar Kamtsa et le jeta dehors.
Celui-ci se dit alors : « Etant donné que les Sages qui ont assisté à mon éjection n’ont pas réagi au comportement de leur hôte, cela veut dire qu’ils l’ont approuvée. Je vais aller les dénoncer en haut lieu. »
Il se rendit chez César et lui annonça :
« Les Juifs se sont rebellés contre toi.
– Qui a dit cela ?
– Envoie-leur un animal pour qu’ils l’offrent en sacrifice dans leur Temple, et vois ce qu’ils en feront ! »
César chargea Bar Kamtsa d’offrir en son nom un veau en sacrifice, mais celui-ci occasionna à l’animal un défaut physique le rendant inapte à être présenté sur l’autel.
Le refus qui s’ensuivit de la part des prêtres fut le point de départ de la crise qui précipita la Judée vers sa perte et le Temple vers sa destruction (Voir Yoma 9b et Guitin 55b-56a).
On peut constater à la lecture de ce récit, dont il importe peu qu’il relate un fait historique ou qu’il soit légendaire, que les valeurs morales qui caractérisaient la Judée dans les années qui ont précédé la destruction du Temple étaient relâchées, non seulement dans la population, mais aussi – et peut-être surtout – parmi les élites.

2. L’appellation de « Michné Tora » désigne dans la littérature rabbinique le cinquième livre du Pentateuque, le Deutéronome. Elle signifie « répétition de la Tora » et correspond ainsi très exactement à l’appellation qui lui a été donnée en français en référence au mot grec Δευτερονόμος (« Deutéronomos »).