Conversation 48899 - Gestion du deuil
Bonsoir et Hag sameah,
Un deuil, surtout celui d'une mère, est un drame quotidien qu'il faut apprendre à gérer coûte que coûte.
Nous sommes, BH, une famille très unie mais avec des personnalités très différentes et cela ne va pas sans heurts.
Ces premières fêtes sans Maman sont une torture pour nous tous mais nous le vivons tous différemment. Mon frère est devenu très dur envers nous ses soeurs et sa femme nous fait sentir tous les jours que notre désespoir l'ennuie... Elle nous a même dit que passer les fêtes avec nous lui était très désagréable, sans aucun respect pour ma jeune soeur qui a cuisiné toute la semaine pour faire une table digne de ma mère.
Pour mon père, qui a subi tant de malheurs déjà, le coeur n'y est pas. Pour la première fois de sa vie, alors que chaque épreuve l'a ramenée vers le religion, là il se force car il n'y croit plus. Je fais mon possible pour lui faire comprendre qu'au MINIMUN, c'est une mitsva pour Maman qui a gardé intacte sa emouna jusqu'au dernier souffle. Mais comment trouver les mots ?
Ma jeune soeur est dans la colère et la rage et je n'arrive pas non plus à trouver que lui dire.
Ma soeur aînée pleure à longueur de journée quand elle ne dort pas pour ne pas penser. Elle est en boucle sur un millier de choses et nous empêche de penser à autre chose ne serait-ce que deux minutes.
Moi, enfin, j'apparais comme un monstre froid car pour moi, ma mère est à mes côtés à chaque minute et je veux la rendre fière de moi. Alors je ne sors jamais sans être apprêtée, je monte mon entreprise, je prépare mon mariage, je visite des appartements, bref je vis comme ma mère l'aurait voulu, et je pleure tout mon soûl la nuit pour ne perturber personne. Du coup, je suis une égocentrique alors qu'aucune de mes pas n'est guidé par autre chose que Maman, qu'Hashem la protège.
Est-il péché de vivre les choses comme je le vis ? Comment faire comprendre ma démarche sans avoir à justifier ce qui leur paraît injustifiable ?
Mes paroles sont peut-être atroces, mais Maman est partie, et rien que je puisse faire ne la fera revenir. Mes seules armes sont de l'honorer pour la rendre fière de moi, pour lui offrir tout ce que je n'ai pas eu le temps de lui donner de son vivant : une belle carrière, un gentil mari, des petits enfants...
Suis-je ce monstre que ma famille semble voir en moi ?
Dois-je me plier à la tendance générale de doutes, de lamentations et de rage pour être de nouveau acceptée par cette famille que j'aime tant ?
Je souffre terriblement de cette situation et j'espère que vous aurez, comme à l'accoutumée, les bons mots et les bons conseils que j'attends avec tant d'impatience.
Merci encore et encore tous mes voeux pour ces fêtes...
PS : Maman est partie le 21 av, c'est donc encore très frais...
Il ne m’appartient pas, cela va de soi, de vous suggérer comment gérer votre deuil. Celui-ci vous est strictement personnel, et il revient à chacun de l’assumer selon sa sensibilité et son affectivité.
Je me contenterai ici de vous fournir une indication sur la façon dont la Tora dicte notre attitude dans le cas de la perte d’un être cher.
Lorsque les fils de Jacob ont annoncé à leur père que leur frère Joseph, qu’ils venaient de vendre à une caravane de passage, était mort, notre patriarche « refusa d’être consolé » malgré le réconfort que voulaient lui procurer ses enfants (Berèchith 37, 35).
Contrairement à ce que pourrait laisser supposer une lecture superficielle du texte, ce refus n’était pas dû à l’intensité du chagrin de Jacob, dont la douleur aurait été si intense qu’il en aurait été inconsolable. En réalité, expliquent les commentateurs, il pressentait que la nouvelle de la mort de Joseph était fausse, de sorte qu’il ne pouvait être question pour lui d’une quelconque consolation.
On considère à l’inverse, dans le cas d’un deuil veritable, que l’on doit non seulement consoler celui ou celle qui vient de perdre un être cher, mais que celui ou celle qui est en deuil a le devoir de se laisser consoler. Ce couple « consolé – consolateur » implique qu’un moment devra nécessairement venir où l’un comme l’autre auront accompli leur mission respective, et que le deuil devra alors prendre fin. Car la consolation est un cadeau divin auquel nous n’avons pas le droit de nous soustraire.