Conversation 60786 - La Torah deconseille la guerre?

haviv-ba
Mardi 3 janvier 2012 - 23:00

Chalom.
Y a-t-il un passage dans la torah déconseillant fortement la guerre avec les nations étrangères?

Daniel Levy
Dimanche 13 mai 2012 - 13:47

Chalom,

Tout d'abord, l'objectif final est la paix, meme si la guerre peut etre le moyen d'y parvenir. Je crois que cette proposition ne necessite pas d'etre demontree, tant ses sources sont nombreuses, et le theme de la paix omnipresent (tenez, le "Chalom" apparait meme en debut de mes reponses).

Pour ce qui est d'un passage de la Thora deconseillant la guerre (fortement ou pas, a vous d'en juger), je vous propose le verset suivant:

[Devarim 20,10]: "Ki tiqrav el 'ir lehila'hem 'aleiha, veqarata eleiha lechalom", ce qu'on peut traduire ainsi: "Quand tu approcheras d'une ville pour l'attaquer, tu l'inviteras a la paix".

Il y a la une Mitsva, un commandement [Note: l'opinion du Rav Iben 'Ezra n'a pas ete retenue: selon lui, la seconde partie du verset pourrait etre la suite de la condition premiere, introduisant la procedure detaillee dans les versets suivants, qui serait elle et elle seule le commandement].

Quelle en est la raison?

On peut y voir une logique interessee: si on peut obtenir la soumission par la paix, pourquoi combattre en vain? "Le monde est ainsi fait (...) que dans toutes les guerres, il y a des pertes humaines meme parmi les vainqueurs" [Ramba"n]. L'auteur du Sefer Ha'hinoukh [Mitsva 527], dans le cadre de la 2eme explication qu'il suggere, donne une autre raison interessee: preferer que le roi ait de nouveaux sujets a son service, sans depenses, plutot qu'une mise a mort depourvue d'interet, qui serait du gachis et interpretee comme un acte de cruaute.
D'apres ces explications (ou autres explications similaires), le but de cette Mitsva est de precipiter une victoire de l'armee d'Israel et d'accroitre ses gains, sans pertes.

Seulement, si l'on prete attention a la forme du verset cite, on sentira le paradoxe qui s'en degage: tu t'approches d'une ville pour la combattre et je t'ordonne de l'inviter a la paix. L'invitation a la paix va a l'encontre de l'approche pour combattre!
La formulation employee par le Ramba"m pour cette obligation [Lois des rois et leurs guerres 6,1] montre bien qu'il y a la une conception morale fondamentale, qui n'a rien a voir avec toute consideration d'ordre militaire, politique ou economique:
"On ne fait jamais de guerre avec personne au monde, sans avoir propose la paix au prealable, que ce soit dans le cadre d'une guerre de Mitsva ou facultative (...) et il est interdit de trahir cette alliance et de leur mentir une fois la paix etablie (...).".
L'auteur du Sefer Ha'hinoukh egalement, propose en tant que 1ere explication de cette Mitsva: "car la pitie/misericorde est une qualite, et Israel en particulier, se doit de l'adopter dans tous les contextes, y compris envers des ennemis idolatres".

En resume, il est parfois necessaire ou obligatoire de combattre, mais quelle que soit la guerre entreprise, la Thora nous demande de l'eviter en proposant la paix.
"car la pitie est une qualite (...) y compris envers des ennemis idolatres"

okay
Lundi 14 mai 2012 - 23:00

Dans le sens de votre reponse, Au sujet de la 60786 , il y a un joli rashi sur le Chalom perek 26 passouk 6

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Daniel Levy
Mardi 15 mai 2012 - 04:33

Chalom,

Merci pour cette contribution.
Le Rach"i en question se trouve dans le livre de Vayiqra et plus precisement dans une paracha qu'on lit cette semaine (Be'houqotay).
Le contexte est qu'a la suite des benedictions agricoles promises, apparait celle de la paix.
J'en copie ici la traduction de Jacques Kohn 'alav haChalom.

Je donnerai la paix dans le pays Peut-être direz-vous : « Il y a de quoi manger et de quoi boire, mais à défaut de paix cela n’a aucune valeur ! » C’est pourquoi il est écrit ensuite : « Je donnerai la paix dans le pays ». D’où l’on apprend que la paix pèse du même poids que tout le reste. De même est-il écrit : « Je fais la paix et suis le créateur de tout » (Yecha’yah 45, 7).