Conversation 2439 - Expliquer la notion de Famille

Anonyme
Dimanche 17 novembre 2002 - 23:00

qu'est ce que la famille dans le judaisme?

Rav Yitshak Chouraqui
Mardi 3 décembre 2002 - 23:00

Pour le judaïsme, la famille est tout d'abord le principe de base, le fondement premier sur lequel s'établit la société préconisée par la Thora. Cela est mis en évidence par un système de devoirs qui incombent à l'individu vis à vis de la famille ainsi que des responsabilités à l'intérieur de la famille qui visent à la souder et à l'unir. De plus, dans l'état juif, la famille a un statut privilégié (par exemple pour la répartition du territoire). Tout cela contribue à donner à la famille un rôle de première importance dans la société juive: elle veille à l'ancrage et à l'équilibre profond de la société, à mi-chemin entre l'individu et la collectivité. Déjà par ce rôle social prépondérant, le judaïsme prend le contrepied de toute la civilisation occidentale. Dans la Grèce antique, l'idéal des relations humaines était la pédérastie (je vous renvoie au Banquet de Platon). Deux mille cinq cents ans après, les sociétés modernes n'ont rien à envier à la dépravation morale du monde classique qu'elles admirent tant. La civilisation chrétienne, ensuite, ne considérait la famille que comme un état de chose peu recommendable, encourageant l'homme de religion à s'élever au dessus du péché lié à la chair (tant et si bien que les monastères furent souvent des lieux de débauche) et prêchant pour tous les croyants que celui qui n'abandonnera pas son père, sa mère, ses frères et ses sœurs pour suivre la bonne doctrine, n'aura pas rempli jusqu'au bout son devoir. Enfin, toute l'histoire occidentale n'a manifesté que mépris pour toutes les valeurs familiales (mari-femme, parents-enfants) pour aboutir en apothéose au célèbre «Familles, je vous hais!».
Pourtant ne présenter la famille que par son aspect social serait restreindre son importance, et diminuer la grandeur qui est la sienne. Car en fait, le judaïsme voit dans la famille «un pemier Temple, un premier autel, un premier sacerdoce». Aucun juif ne peut servir pleinement l'Eternel sinon dans la cadre de la famille ? C’est par elle que l’homme juif se rattache à son histoire, rend hommage à la création du monde en s’associant à D. pour créer et donner la vie aux générations qui continueront à vivre la grande aventure du peuple juif. Former une famille, c’est reconstruire un peu le Temple de Jérusalem. Lorsqu’une famille se rassemble autour d’une table pour parler de Thora, le père, comme un prêtre, dirige un autel. Et c’est par la mère, qui veille à la cohésion et la force profonde du foyer, que l’identité juive se transmet. Car au fond cette identité a pour origine une famille. Et ce qui rapproche deux juifs l’un à l’autre c’est qu’ils sont des Bene Israël, des enfants de la famille de Jacob, famille disloquée presque définitivement et pourtant réunie et ressoudée à l’ultime moment: la maison de Jacob décrite au début du livre de Chemot «et yaakov ich oubeto baou» (avec Jacob chaque homme et sa famille (descendirent en Egypte)).
Et puisque nous fêtons Hanouka, les lumières que nous allumons «ich oubeto» (chaque homme et sa famille) marquent le triomphe de la famille juive sur la civilisation grecque. Cest quand les grecs ont porté atteinte à la famille (en empechant les mariages) que les Hachmonaïm ont déclenché la révolte. Les grecs avaient compris que c’est par la famille que l’esprit d’Israël se perpétue au long de l’histoire. Et la victoire de Hanouka c’est la victoire de la flamme des familles juives sur toutes les civilisations étrangères.
Chalom
Itshak Chouraqui.