Conversation 16710 - Spinoza et moi

NathanninNathan
Mardi 1 juin 2004 - 23:00

Rav yakar, toutes les réponses aux questions que je vous ai posées ont été justes, précises, honnêtes, franches,éclairées et éclairantes. Je vous souhaite longue vie et réussite,ainsi qu'à vos collègues pour ce superbe site.
En discutant hier de D' avec un ami apikoros,il m'a affirmé que je me fourvoyais encore plus que lui,car lui n'y croit pas alors que moi,j'aurais une conception spinoziste de Lui.
D'ieu, tel que je L'imagine (oui,je sais,nous ne pouvons pas nous Le représenter dans Son Infinie Grandeur) est Celui qui A Créé notre univers et tous les univers.J'imagine l'univers comme une particule au sein d'un univers lui-même particule au sein d'un univers et ce sans fin.Et D'Est et Règne sur cet infini qui est Un,Seul et sans partage. Donc tout ce qui nous entoure fait partie de Lui,tout ce qui arrive est Son Dessein(bien?mal?ce sont nos interprétations),et une étincelle de Lui est en nous.
N'ayant pas lu Spinoza,je ne peux répondre à ses propos,mais je sais que Spinoza avait été excommunié,probablement à cause de ses idées.Si les dires de mon ami s'avéraient et que je m'égarais effectivement,auriez-vous l'amabilité de m'indiquer la bonne voie?
Merci d'avance,car la possibilité d'être dans l'erreur me ronge et me taraude

Rav Elyakim Simsovic
Mercredi 2 juin 2004 - 23:00

a. Vous faites erreur dans votre formulation car ce dont vous parlez n'est pas une représentation de Dieu mais de la relation entre Lui et le monde créé.
b. l'exposé de cette relation correspond à ce que le Pr Neher zal a appelé le panenthéisme, (= tout est en Dieu) par opposition au panthéisme (=tout est Dieu). Cette conception correspond en substance à l'expression traditionnelle : Dieu est le Lieu du monde et ce n'est pas le monde qui est Son lieu.
c. Spinoza n'a pas été excommunié à cause de ses idées. Il n'avait encore rien publié à ce moment là. Il a été excommunié à cause de ses insolences publiques à l'égard des rabbins et des responsables de la communauté.
d. la formule "tout ce qui arrive est Son dessein (bien?mal?ce sont nos interprétations)" n'est pas exact au sens où tout ce qui arrive inclut nos actions et celles-ci ne sont pas déterminées par Sa volonté mais de la nôtre. De plus, bien? mal? ne relève pas seulement de notre interprétation, ce qui laisserait entendre que le bien et le mal seraient relatifs, ce qui n'est pas le cas.
e. votre ami commet aussi une erreur de logique. En effet, l'affirmation de "ne pas y croire" implique nécessairement une conception du "y" en qui ou quoi il ne croit pas, sans quoi cette affirmation est totalement privée de signification.

NathanninNathan
Mercredi 2 juin 2004 - 23:00

Suite à 16710,Rav,le panenthéisme est-il ou n'est-il pas une hérésie?

Rav Elyakim Simsovic
Samedi 5 juin 2004 - 23:00

Le panenthéisme, certes non ! Il me semblait que c'était clair !? Contrairement au panthéisme qui limite au monde lui-même l'extension du divin, le panenthéisme exprime à la fois le dépassement du monde par le divin et la subordination du premier au deuxième tout en évitant aussi le piège de la confusion de substance entre l'Un et l'autre.

babaz
Mardi 16 août 2011 - 23:00

16775

Bonjour,

Permettez-moi de vous rappeler que certains qualifièrent la philosophie de Spinoza de panenthéisme.

Pour davantage d'informations : http://www.spinozaetnous.org/ftopic-177-0-days0-orderasc-.html

Merci

Rav Elyakim Simsovic
Samedi 17 septembre 2011 - 20:37

L'expression classique de Spinoza "Dieu, si tu veux la nature" (Deus sive natura) s'inscrit en faux contre une telle interprétation car elle établit une équivalence absolue entre les deux termes: Dieu = La nature alors que pour le panenthéisme ("tout est en Dieu") l'équation serait Dieu > La nature (la notation de la théorie des ensembles serait peut-être plus appropriée...)
Cela dit, ce surtout les implications ici, ou les conséquences directes de ses positions qui comptent : pour lui, déterminisme absolu, négation de la liberté humaine.
Toutefois, plus grave encore, c'est son attitude de dérision à l'égard de la communauté juive, de ses cadres et de ses maîtres qui le condamne, bien plus que sa philosophie.

babaz
Samedi 17 septembre 2011 - 23:00

58839

"Dieu c'est-à-dire la Nature" : mais vous rappelez-vous que la Nature de Spinoza nous dépasse infiniment ?

Pour Robert Misrahi, le déterminisme absolu de Spinoza constituait à son époque une arme libératrice contre la superstition et la croyance. Ajoutez-y, comme lui, une doctrine de la liberté, et le compte y est.

Quant à la dérision, l'anthropomorphisme biblique était, pour un individu de son envergure, absolument dérisoire (Ethique I, appendice)

Merci

Rav Elyakim Simsovic
Dimanche 18 septembre 2011 - 11:32

Un esprit comme le sien, n'était-ce le mépris qu'il avait pour les rabbins, aurait-dû être capable de comprendre qu'il n'y a absolument aucune trace d'anthropomorphisme dans la Bible. Ce qu'il tenait pour tel et ce que bien des esprits plus superficiels que le sien tiennent pour tel est bien différent. Le Maharal de Prague se mesure dans Beer Hagola à de telles méprises qui sont pour la plupart loin d'être innocentes..

Par exemple, votre question sur "l'autorité" des versets (cf la matrilinéarité) illustre assez bien le fait que nous parlons ici - pour ainsi dire - des langues différentes. Mais vous devez vous rendre compte que les préjugés sont de votre côté.

Arme libératrice contre la superstition ? soit. Mais pourquoi toute croyance serait-elle a priori détestable et à rejeter? Ne faudrait-il pas à tout le moins vérifier les témoignages et la fiabilité des témoins? Spinoza aurait-il été capable de la patience de suivre une lecture talmudique de M. Lévinas ? De comprendre pourquoi M. Lévinas avait un tel respect et une telle considération pour ces maîtres du Talmud pour lesquels Spinoza n'avait quant à lui que mépris et dédain?
Spinoza s'est considéré d'emblée au-dessus de ces vétilles. Et c'est pour cela qu'en fin de compte il n'y a rien compris, quelqu'acéré ait été son esprit.
Il se croit assez supérieur pour pouvoir parler de Dieu. Mais il ne croit pas que Dieu soit assez supérieur pour qu'il ait à écouter ce que Dieu lui dit.