Conversation 3481 - Vivre avec le secret

Anonyme
Mercredi 1 janvier 2003 - 23:00

shalom, suite à la question 2143,
J'ai une question tres delicate a poser, et j'avoue que la personne ayant posé la question 2143 m'a beaucoup aidé! Merci!
Vous deciderez si cela peut etre ecrit en public sur ce site ou pas;
Voila, ma grande soeur et moi avons perdu nos parents il y a queques temps, (d'abord notre mere, puis quelques annees plus tard notre pere), on a ete placees dans un foyer juif plus ou moins religieux pour poursuivre nos etudes jusqu'a la majorité; aujourdh'ui nous sommes toutes les deux mariees, ma soeur a plusieurs enfants et moi un seul pour le moment, on habite dans la meme ville et on est en tres bons termes; mais j'ai gardé un grand secret depuis ma tendre enfance que j'aimerai vous reveler: j'ai subi des attouchements sexuels par mon pere quand j'etais tres jeune... c'etait enfoui dans ma memoire pendant des années, et depuis le jour ou cela a ressurgi je ressens le besoin d'en parler a quelqu'un , un professionnel qui pourrait m'aider a "vivre" vraiment avec cet element de mon passé que j'ai vainement essayé de refouler; mais, le gros probleme que j'ai depuis des annees est la crainte de transgresser le respect de nos parents; Pour moi le respect des parents est aussi valable apres leur mort (pour la Tora aussi?), et a partir du moment ou j'en parle a un psy par exemple, il/elle risquerait de provoquer en moi peut-etre de la colere ou de la haine envers mon pere que j'aime tellement; mais pourtant je vis tres mal avec cela, meme si j'essaye de lui trouver toutes les raisons du monde, je l'aime trop meme pour lui faire de la peine la ou il est; Bien evidement je n'en parlerai jamais a des gens qui l'ont connu, mais je sais que certains conflits que je vis aujourdh'ui avec mon conjoint proviennent de cet element; je n'en ai jamais parlé a mon mari, il sait simplement que j'ai subi cela quand j'etais petite, par un "ami" de la famille et que personne n'est au courant a part lui; mais je ne veux surtout pas qu'il pense du mal de mon papa.
S'il vous plait aidez-moi - si vous le pouvez,
Pardon pour la longueur de cette lettre, et Merci pour votre soutien,

Rav S.D. Botshko
Jeudi 2 janvier 2003 - 23:00

J'ai lu votre lettre avec attention et je vais m'efforcer de répondre à votre question qui peut se résumer ainsi:
A-t-on le droit de dire du lachon Hara à un thérapeute sur quelqu'un qui nous a fait du mal?
La réponse est que c'est tout à fait autorisé.
Ceci pour plusieurs raisons. Un médecin ou un rabbin n'écoute pas pour penser du mal de qulqu'un mais pour aider la personne qui souffre.
De plus, dans la Halakha, nous voyons que l'on a même l'obligation parfois de dire du lachon Hara, par exemple pour prévenir quelqu'un d'un tort qui pourrait lui être causer.
Aussi, dans votre cas, vous pouvez, peut être même devez en parler à quelqu'un qui puisse vous aider, un thérapeute ou un proche.
J'ajouterai que votre père n'étant plus de ce monde. Il a quitté le monde du mensonge et de l'apparence. Rien ne peut être plus favorable pour son repos que le fait que vous soyez heureuse, bien dans votre peau et que les plaies qu'il a ouvertes se soient cicatrisées.

Bien entendu vous avez des sentiments contradictoires envers lui. Ne vous sentez pas coupables de ses sentiments. Vous avez tout à fait le droit de condamner ce qu'il vous a fait et malgrès tout l'aimer parcequ'il est votre père et l'homme qui vous a donné la vie. La Halakha a d'ailleurs légitimé ces sentiments contradictoires. Lorsqu'un homme décède, ses enfants doivent prononcer deux bénédictions, l'une qui exprime la peine et la douleur:Bénit Celui qui juge juste, l'autre qui exprime la reconnaissance d'être arrivé à ce jour (Shehekhiyanou) où les enfants bénéficient de l'héritage.

La Talmud dit aussi, qu'un père ne peut sauver ses enfants par ses mérites, mais que les enfants peuvent sauver leur père par leur mérite. En d'autres temes, vous n'avez aucune responsabilité dans les actes commis par votre papa et sans doute, il s'agit d'un homme complexe où le meilleur a dù côtoyer le pire. La Guemara enseigne, que des hommes comme Haman ou Sissera ont eu des descendants qui se sont convertis et sont devenus des hommes de Thora.

En conclusion, vous pouvez en parler librement à un thérapeute ainsi qu'à vos proches. Je suis persuadé, qu'avec votre époux, vous construisez une Bayit néeman Beyisraël, une belle maison juive, une maison tournée vers l'avenir pour servir Hachem dans la joie.

Avec toutes mes Berahot.

Anonyme
Vendredi 3 janvier 2003 - 23:00

Vous écriviez "La Guemara enseigne, que des hommes comme Haman ou Sissera ont eu des descendants qui se sont convertis et sont devenus des hommes de Thora."
N'a-t-on pas pendu tous les fils de Haman?

Rav S.D. Botshko
Samedi 4 janvier 2003 - 23:00

La référence de cette guemara est Sanhédrin 96b.
Vraissemblablement que bien que tous les fils de Haman aient été tués, il devait avoit déjà des petits fils.

Anonyme
Lundi 6 janvier 2003 - 23:00

Suite a la question 3481,
Cher Rav, je voudrais vous remercier du fond du coeur; Votre reponse, le choix des mots que vous avez employés m'ont vraiment reconforter!
Le bien-etre que j'ai ressenti apres avoir lu votre reponse, et pris la decision d'en parler a certainement permis a mon papa d'enfin "se reposer" en sachant qu'a present je pouvais me sentir mieux, et il doit vous remercier et vous envoyer des Berah'ot de la ou il est.
Qu'Hachem fasse que vous puissiez aider encore des milliers d'ames et que l'on soit vite delivré.
Amen et chouv TODA !

Rav S.D. Botshko
Mardi 7 janvier 2003 - 23:00

Je vous remercie pour vos mots d'encouragment.

Et encore une fois toutes mes Berahot pour votre famille.