Conversation 1320 - Equilibre entre l'étude et l'activité profane

Anonyme
Jeudi 22 août 2002 - 23:00

bonjour,

1. Je voulais savoir quel intérêt peut-il y a voir pour un juif à accumuler du savoir "khol" ?

2. Peut-on décemment croire que quelqu'un qui s'adonne à temps complet à l'étude de la Torah peut faire vivre une famille voyant les difficultés financières grandissantes que rencontrent toutes les yechivot de par le monde pour fonctionner et le nombe de pauvres parmi les nôtres parfois vivant dans des situations proches de la misère ?

Est-ce qu'un homme à qui le monde du travail ne convient pas, doit pour autant abandonner l'idée de gagner une parnassa (ayant des compétences recherchées sur le marché du travail) et se tourner uniquement vers l'étude ?

Quel équilibre est-il possible de trouver entre les deux mitsvot de l'homme que sont le limoud et la parnassa ?

Rav Elie Kahn z''l
Jeudi 12 septembre 2002 - 23:00

Un tres grand nombre de textes d’epoques variees traitent de votre question et semblent donner des avis differents. La restion reste ouverte juqu’a nos jours, et vous pourrez recevoir des reponses tres variees: d’apres tel rabbin toute etude profane est strictement interdite, pour un autre elle sera autorisee, et un troisieme vous dira que c’est une mitsva.
Je me contenterai de citer quelques textes qui traitent du sujet.
Talmud de Babylone, Menahot 89 b:
“Ben Dama, le neveu de Rabbi Yichmael posa la question a Rabbi Yichmael: une personne comme moi, qui a etudie toute la Tora, peut-elle etudier des sciences profanes (Hohma Yevanit, litteralement, la science grecque)?
Il lui lit le verset (du livre de Yeochoua-Josue): “le livre de la Tora ne quittera pas ta bouche et tu l’etudieras jours et nuits”. Cherche un moment qui n’est ni jour ni nuit et livre toi aux etudes profanes.
Cette opinion diverge de celle de Chmouel qui que ce verset n’est ni une obligation ni une mitsva, mais une promesse”.

A la lecture de ce texte il semble donc qu’un rabbin interdit les etudes profanes car chaque instant doit etre consacre a l’etude de la Tora, tandis qu’un autre rabbin pense qu’il y a d’autres occupations legales.
Le meme dialogue a quelques differences pres est cite dans le Talmud de Jerusalem (Pea 1,1). L’interdiction n’y est pas justifiee par l’obligation de ne se livrer qu’a l’etude de la Tora, mais par la crainte des “masorot”, des denonciateurs. On craignait apparemment que ce genre d’etudes ne rapprochent trop ceux qui s’y livrent de la civilisation grecque.

Dans la Michna (Sota 49 b) il est ecrit que pendant la guerre de Vespasien (il s’agit de la revolte de 67-70) des rabbins ont interdit par decret l’enseignement de la sagesse grecque aux enfants.

Le Maharal de Prague (16 s.) explique que la sagesse grecque dont il est question est la science de la rethorique, mais que c’est une mitsva d’etudier les sciences de la nature (Netiv HaTora, ch. 14).

Plus pres de nous, Rabbi Samson Raphael Hirsch (Allemagne 19 s.) ecrit qu’il est tout a fait autorise d’etudier des etudes profanes, mais que la preoccupation principale doit etre la Tora (voir par exemple son commentaire sur Vayikra-Levitique 18,4). Quand on posa a un rabbin d’Europe Orientale, le Rav Chmouel Lebovitz ce qu’il fallait penser de cette opinion, il repondit qu’il ne la partageait pas, mais qu’elle etait valable dans les conditions d’assimilation qui regnait en Allemagne.

Ainsi que je l’ai ecrit au debut de ma reponse, cette question divise encore aujourd’hui les rabbins.
Pour ma part je ne peux pas croire que la Tora nous ordonne d’etre toujours dependant pour le progres materiel du Peuple Juif de non Juifs ou de Juifs transgressant la Tora. Et je connais de tres nombreuses personnes alliant en harmonie parfaite l’etude approfondie de la Tora et la stricte observance de ses lois avec des connaissances tres pointues en differentes matieres profanes.