Conversation 59018 - Leibovitz sur la Providence
La position de Leibovitz sur la prière et la Providence vous paraît-elle fondée ?
Merci
Chalom,
Le prof. Leibovitz avait des exigences extremement elevees que ce qui peut etre considere comme un service de Dieu desinteresse (lichma). Pour celui qui est capable de vivre son Judaisme a ce niveau spirituel, c'est certainement tres bien. Mais c'est probablement difficile pour la plus grande partie de nos freres. Donc, pour vous repondre, les positions de Leibovitz sont certainement dignes de respect, mais ne peuvent etre partagees que par un petit nombre de gens.
suite à la question 59018
Merci beaucoup pour votre réponse.
Permettez-moi cependant de préciser ma question sans doute trop évasive :
1. Dire que Dieu n'intervient pas dans le cours des choses, Maïmonide à l'appui, et que la "Hachga'ha" ne saurait être assimilée à une souveraineté de type humain tel que l'exercerait un gouvernement vous paraît-elle défendable ?
2. Peut-on considérer la Mitsva de la Tfila comme une Mitsva qui n'aurait pas pour finalité d'obtenir quelque chose de Dieu (cela étant d'ailleurs cohérent avec la position relative à la Providence) ?
Un grand merci pour l'attention que vous porterez à mes questions. C'est toujours un réel plaisir de vous lire.
Chalom,
Vous avez peut-etre entendu que Leibovitz etait surnomme, encore de son vivant, un "kofer chomer mitsvot" (en francais: un heretique qui accomplit les commandements), tant ses vues, en particulier celles que vous mentionnez, choquaient ses contemporains.
Mais personnellement, en tout cas, je ne peux adherer a cette condamnation. L'idee de Providence (Hachga'ha) a ete comprise de mille manieres differentes au cours des ages, et force est d'admettre qu'il existe une certaine latitude ideologique a ce niveau. Leibovitz heurte sans doute ici le sentiment naturel de bien de nos correligionaires, qui parlent souvent d'intervention divine dans leurs vies, mais il va dans le sens de la Science, laquelle n'a a ma connaissance jamais observe aucun evenement rompant clairement avec les lois naturelles connues (miracle).
Il en va de meme avec la conception leibovitzienne de la priere. Ici aussi, je pense que Leibovitz va a l'encontre du sentiment religieux le plus naturel (apres tout, le Chemoneh Esreh est redige sous la forme d'une liste de petitions adressees a Dieu). Mais c'est quelque part un niveau tres eleve que d'etre capable de prier Dieu sans rien en attendre en retour, une version extreme du concept ancien de "avoda lichma".
La pensee du prof. Leibovitz combine de maniere ingenieuse les sources juives anciennes avec certaines idees philosophiques modernes, en particulier l'idee kantienne d'autonomie. Je pense qu'il plaque ses propres idees dans les mots de Maimonide, et que la vision qu'il defend n'appartient qu'a lui seul. Pour autant, il me semble que cette vision doit pouvoir trouver sa place au sein du judaisme orthodoxe.