Conversation 3009 - Et la divorcee, alors?

Anonyme
Samedi 14 décembre 2002 - 23:00

pourquoi la divorcée ne fait pas partie du groupe souvent cité dans la tora et qu'Hachem protège tout particulièrement
Merci

Rav Elyakim Simsovic
Dimanche 9 février 2003 - 23:00

Il me semble nécessaire tout d'abord de "rectifier" la formulation de votre question. Hachem protège équitablement toutes ses créatures. Parmi elles, Il nous demande de veiller plus particulièrement sur certaines que les circonstances de la vie ont rendu fragile.
Le modèle, c'est le guèr (1), la veuve et l'orphelin. Parfois aussi le Lévi. C'est là le groupe auquel vous faites allusion.

Du point de vue des règles d'herméneutique, la Thora n'écrit pas en toutes lettres ce qui peut se déduire par ailleurs. Dans tous les cas où la condition de la divorcée serait existentiellement comparable à celle de la veuve, ce qui est dit de cette dernière s'appliquerait aussi à elle, comme à tous les pauvres et indigents.
Je donnerai de cela un exemple tiré d'une situation très différente. Dans le passage qui institue le Chabbat (2) et que nous disons dans le Qiddouch de Chabbat midi, il est dit : "Toi, ton fils, ta fille, ton serviteur et ta servante et ton animal et aussi le guèr qui est dans ta ville". On ne parle pas de la femme. Pourquoi ? Parce qu'elle incluse dans "Toi", le commandement s'adressant directement à elle aussi, et indirectement les autres sont sous sa responsabilité comme ils sont sous celle du mari.

La Thora aurait pu théoriquement dire "la divorcée" au lieu de la veuve. Mais le fait d'être veuve n'a dépendu a priori de la volonté de personne, c'est le cours de l'existence qui provoque cela, alors que le divorce est un fait humain et social, que la Thora déplore et même réprouve, mais qu'elle reconnaît parfois indispensable car il n'y a pas de raisons de condamner deux êtres au malheur perpétuel leur vie durant.

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(1) On traduit par "converti" mais c'est un peu insuffisant et inexact ou alors par "prosélyte" et là ça fait franchement précieux à mon goût. La conversion est un changement de foi. La guérout est un changement d'identité. On ne se "convertit" pas à la religion juive, on devient membre à part entière du peuple d'Israël. C'est quand même autre chose.
Je veux dire encore un mot à propos du guèr.
Le guèr est par condition un être devenu solitaire. Comme orphelin de père et de mère le plus souvent, mais en plus, contrairement à ce dernier, littéralement sans aucune famille. Bien sûr, nous l'accueillons chaleureusement, avec infiniment de tendresse, mais nous savons qu'il faudra beaucoup de temps, qu'il ait fondé une famille, eu des enfants pour qu'il retrouve un peu de terrain stable sous ses pieds. Difficile pour nous d'imaginer le courage quotidien et la ténacité dont il ou elle doit faire preuve. Ce sont vraiment des âmes d'exception !
Pour toutes ces raisons, la Thora requiert que nous leur aménagions sans restriction une place parmi nous.

(2) Exode, 20:10.