Conversation 39145 - La shoah ? Ils l'ont bien méritée ?

falafel
Jeudi 1 novembre 2007 - 23:00

Suite a la question 21715.

Chers rabbanim,

Je vous ai pose une question il y a longtemps. Vous m'avez repondu de rechercher la reponse dans le livre d'Elie Kahn ou de rechercher sur le site. Je ne dois pas etre tres malin puisque je n'ai rien trouver, faute de mots cles efficaces.

Bref, je reviens vers vous, puisqu'apres mon pere, c'est au tour d'amis a moi, religieux ou moins -tous sefarades- de me refaire le coup de "Ils l'ont bien merites", "la vie anterieure", "D. avait une bonne raison".

Merci de me repondre en citant les sources, car je sens que le bon sens, la morale et l'intelligence ne marchera pas avec ces gens.

Si 60 ans apres la shoah les juifs disent de tels aberrations, qu'en sera-t-il dans encore 60 ans avec les goyims ?

Jacques Kohn z''l
Dimanche 4 novembre 2007 - 08:02

On s’est beaucoup interrogé, au cours des soixante dernières années, sur la signification de la Shoah.

Chez certains, cette réflexion a contribué à leur faire perdre la foi, tandis que chez d’autres leur fidélité à Hachem s’en est trouvée renforcée.

Certains, dans les milieux chrétiens, ont vu dans la Shoah une punition du peuple juif pour n’avoir pas accepté Jésus. D’autres ont considéré, et ce parmi les Juifs, et même parmi des rabbins renommés, qu’elle était une punition infligée par Hachem pour n’avoir pas obéi à la Tora.

Cette seconde explication me paraît tout aussi inacceptable, et même plus scandaleuse, que la première. Elle revient en effet, d’une part, à vouloir lever un coin de voile sur ce qui demeure un mystère de la volonté divine, et à se substituer à cette volonté, fondamentalement inexplicable. Elle aboutit, d’autre part, à nous culpabiliser et à nous imputer une part de responsabilité dans ce génocide unique à travers l’histoire.

Hachem reste « caché » et ne Se révèle pas. Cette condition est voulue par la psychologie de l’homme tout autant que par le projet même de Dieu dans la création : Il ne se montre qu’à ceux dont la foi est si grande que Sa révélation ne changera rien à leur croyance.

Car s’il y a eu dans la Shoah « silence de Dieu », il y a eu tout autant silence des hommes, et c’est là peut-être la seule explication un tant soit peu rationnelle que l’on puisse lui donner.

Une des spécificités de la Shoah a résidé dans le fait que les Nazis ont continué de déporter et de massacrer les Juifs alors même qu’ils étaient sur le point de perdre la guerre, alors même que les déportations compromettaient leurs efforts du point de vue militaire. Rappelons-nous que les trains vers Auschwitz ont continué de rouler malgré la précarité criante de leurs voies de communications et de leurs moyens de transport.

C’est dire que la Shoah a consisté à massacrer les Juifs non pas en tant qu’ennemis de l’Allemagne, mais en tant que Juifs, interdits à ce titre de continuer de vivre.

Je voudrais, pour conclure, citer deux sources d’inspiration très différente, mais très congruentes à notre sujet :

1. « Un jour, à Brooklyn, raconte Elie Wiesel, j’ai demandé au célèbre Rabbi Mena‘hem Mendel Schneersohn de Lubavitch : “Comment peut-on croire en Dieu après Auschwitz ?” Et lui de me répondre : “Après Auschwitz, comment ne pas croire en Dieu ?” Au premier abord, la remarque m’a paru fondée : Puisque tout le reste a échoué – civilisation, culture, éducation, humanisme – comment ne pas se tourner vers le ciel ? Et puis je me suis ressaisi : “Si vos paroles constituent une question, je l’accepte volontiers ; si elles se veulent une réponse, je la récuse.” »

2. « L’un des plus grands maîtres juifs de notre génération, le Rabbi de Klausenbourg (Klausenburger Rebbe), a perdu sa femme, ses enfants et sa famille dans les camps nazis et il a lui-même passé deux ans dans l’enfer d’Auschwitz. Il en a pourtant émergé pour ramener au judaïsme toute une génération de rescapés, pour fonder une communauté à New York, puis une autre en Israël.
J’ai souvent entendu cette éminente personnalité évoquer les camps de la mort et ceux qui y ont péri. J’ai trouvé dans ses propos des larmes et de la tristesse, mais jamais une mise en question. Car c’est bien d’un tsaddiq qu’il s’agit, dont l’esprit pénétrant voit bien au-delà de l’immédiat. Lorsque l’on considère ce qui forme l’Ultime, alors vraiment il n’y a pas d’interrogations.
Le plus important est de nous rappeler que Dieu est le Bien ultime et que, par conséquent, même le pire sera un jour transformé en bien (Rabbi Moché ‘Hayyim Luzatto, Kela‘h pit‘hei ‘hokhma, 2). L’homme peut faire le mal, mais ce mal qu’il fait sera lui aussi racheté par Dieu pour être transformé en bien. Le Talmud nous enseigne que nous devons dans ce monde bénir Dieu tant pour le bien que pour le mal, mais que, dans le monde à venir, nous nous rendrons compte qu’il n’existe rien d’autre que le Bien (Pessa‘him 50a). » (Rabbin Aryeh KAPLAN, Si vous étiez Dieu, Editions EMOUNAH).

Si je puis me permettre de proposer ma propre conclusion, après avoir cité des auteurs aussi éminents, je dirai que la Shoah n’a pas été une punition, et ce notamment parce qu'il n’a pas pu exister de faute ayant pu entrainer un si terrible châtiment. En revanche, lorsque Hachem déclare, par la voix de l’un de ses prophètes, que « Ses pensées ne sont pas nos pensées » (Isaïe 55, 8), Il nous fait prendre conscience de son caractère fondamentalement inexplicable pour nous les hommes.

Ruthie
Dimanche 4 novembre 2007 - 23:00

Suite à la question 39145 :

Ceci n'est que mon humble avis : il me semble que D.ieu a donné à l'être humain le libre arbitre et par conséquent le choix et la responsabilité de ses actes.
Ce sont tous ses actes humains qui ensemblent forgent l'histoire. Donc la Shoah n'est que la résultante des actes des hommes (juifs et non-juifs).

Di.eu n'est pas à l'origine de la Shoah et il n'en est pas responsable. Il n'y a pas punition d'une faute à travers elle, elle est juste l'expression de la haine du juif et du désir de suprématie de quelsques uns que l'apathie des autres à laisser librement s'exprimer.

Dieu ne nous empêche pas de faire des erreurs mais il nous aide à nous relever de nous erreurs et nous guide si nous voulons suivre sa voix et sa voie.

Et au final après la Shoah, Israël nous a été rendu. A nous, maintenant de faire vivre Israël dans la voix de Di.eu

Jacques Kohn z''l
Mardi 6 novembre 2007 - 05:59

Dire que ce sont tous les actes humains qui, ensemble, forgent l’histoire me paraît aller de soi. Prétendre en revanche que Hachem n’est pas à l’origine de la Shoah et qu’Il n’en est pas responsable ne me semble pas acceptable, car cela revient à soutenir qu’Il s’est retiré de la direction de la marche du monde, thèse que le judaïsme ne saurait accepter.

Nous croyons en effet que Hachem est à la fois transcendant et immanent, c’est-à-dire qu’Il est créateur de l’univers et de tout ce qu’il contient, et qu’Il est en même temps immanent, car bon par excellence.