Conversation 39813 - Des pogroms à la Shoa
Bonjour,
Je souhaite vous poser un peu complexe mais pour laquelle le voudrais que vous m'apportier une réponse précise!
Je voudrais savoir si l'on peut raisonnablement conparer en termes d'atrocité ce qui s'est passé pendant l'inquisition en espagne (juifs brulés vifs en espagne...) et la shoah. En effet les juifs ont souffert pendant l'inquisition, certains ont été brulés vifs, les juifs ont ensuite été expulsés d'espagne et du portugal et il n'y avait plus de juifs en espagne (la période d'or du judaisme espagnol a totalement disparu). L'histoire a ensuite montré que les juifs en russie ont d'abord connu toute une série de pogroms avecle soutien de t'état russe! Enfin la shoah a été une chose inimaginable dans la conception même de l'humanité! Treblinka a par exemple fonctionné pendant 16 mois avec 700 000 morts! Le peuple juif a souffert de tout temps!
Ne pensez vous donc pas au vu de tout ce qui s'est passé que les juifs aschkénazes ont le plus souffert dans toute l'histoire du peuple juif et qu'il n'existe aucun équivalent de la shoah dans toute l'histoire du peuple juif? Je vous pose également cette question car certains sépharades ne comprennent pas la souffrance de ceux qui ont connu cette période tragique de l'holocauste!
Merci d'avance pour votre réponse (même si je sais que ma question est un peu complexe)
On s’est beaucoup interrogé, au cours des soixante dernières années, sur la signification de la Choah.
Chez certains, cette réflexion a contribué à leur faire perdre la foi, tandis que chez d’autres leur fidélité à Hachem s’en est trouvée renforcée.
Certains, dans les milieux chrétiens, ont vu dans la Choah une punition du peuple juif pour n’avoir pas accepté Jésus. D’autres ont considéré, et ce parmi les Juifs, et même parmi des rabbins renommés, qu’elle était une punition infligée par Hachem pour n’avoir pas obéi à la Tora.
Cette seconde explication me paraît tout aussi inacceptable, et même plus scandaleuse, que la première. Elle revient en effet, d’une part, à vouloir lever un coin de voile sur ce qui demeure un mystère de la volonté divine, et à se substituer à cette volonté, fondamentalement inexplicable. Elle aboutit, d’autre part, à nous culpabiliser et à nous imputer une part de responsabilité dans ce génocide unique à travers l’histoire.
Hachem reste « caché » et ne Se révèle pas. Cette condition est voulue par la psychologie de l’homme tout autant que par le projet même de Dieu dans la création : Il ne se montre qu’à ceux dont la foi est si grande que Sa révélation ne changera rien à leur croyance.
Car s’il y a eu dans la Choah « silence de Dieu », il y a eu tout autant silence des hommes, et c’est là peut-être la seule explication un tant soit peu rationnelle que l’on puisse lui donner.
Une des spécificités de la Choah réside dans le fait que les Nazis ont continué de déporter et de massacrer les Juifs alors même qu’ils étaient sur le point de perdre la guerre, alors même que les déportations compromettaient leurs efforts du point de vue militaire. Rappelons-nous que les trains vers Auschwitz ont continué de rouler malgré la précarité criante de leurs voies de communications et de leurs moyens de transport.
C’est dire que la Choah a consisté à massacrer les Juifs non pas en tant qu’ennemis de l’Allemagne, mais en tant que Juifs, interdits à ce titre de continuer de vivre.
Je voudrais, pour conclure, citer deux sources d’inspiration très différente, mais très congruentes à notre sujet :
1. « Un jour, à Brooklyn, raconte Elie Wiesel, j’ai demandé au célèbre Rabbi Mena‘hem Mendel Schneersohn de Lubavitch : “Comment peut-on croire en Dieu après Auschwitz ?” Et lui de me répondre : “Après Auschwitz, comment ne pas croire en Dieu ?” Au premier abord, la remarque m’a paru fondée : Puisque tout le reste a échoué - civilisation, culture, éducation, humanisme - comment ne pas se tourner vers le ciel ? Et puis je me suis ressaisi : “Si vos paroles constituent une question, je l’accepte volontiers ; si elles se veulent une réponse, je la récuse.” »
2. « L’un des plus grands maîtres juifs de notre génération, le Rabbi de Klausenbourg (Klausenburger Rebbe), a perdu sa femme, ses enfants et sa famille dans les camps nazis et il a lui-même passé deux ans dans l’enfer d’Auschwitz. Il en a pourtant émergé pour ramener au judaïsme toute une génération de rescapés, pour fonder une communauté à New York, puis une autre en Israël.
J’ai souvent entendu cette éminente personnalité évoquer les camps de la mort et ceux qui y ont péri. J’ai trouvé dans ses propos des larmes et de la tristesse, mais jamais une mise en question. Car c’est bien d’un tsaddiq qu’il s’agit, dont l’esprit pénétrant voit bien au-delà de l’immédiat. Lorsque l’on considère ce qui forme l’Ultime, alors vraiment il n’y a pas d’interrogations.
Le plus important est de nous rappeler que Dieu est le Bien ultime et que, par conséquent, même le pire sera un jour transformé en bien (Rabbi Moché ‘Hayyim Luzatto, Kela‘h pit‘hei ‘hokhma, 2). L’homme peut faire le mal, mais ce mal qu’il fait sera lui aussi racheté par Dieu pour être transformé en bien. Le Talmud nous enseigne que nous devons dans ce monde bénir Dieu tant pour le bien que pour le mal, mais que, dans le monde à venir, nous nous rendrons compte qu’il n’existe rien d’autre que le Bien (Pessa‘him 50a). » (Rabbin Aryeh KAPLAN, Si vous étiez Dieu, Editions EMOUNAH).
Bonjour,
suite à ma question 39813 vous m'avez répondu sur la signification que l'on peut donner à la shoah! Mais ma question était de savoir si l'on peut comparer les atrocités de l'inquisition avec celles de la shoah! si j'ai bien compris votre réponse, l'ampleur de la shoah serait unique et donc incomparable avec toute autre persécution comme l'inquisition?
C’est exactement mon avis, et ce pour diverses raisons dont la suivante :
Le but de l’Inquisition était de parvenir à la conversion des Juifs au christianisme. Une fois convertis, elle ne s’en prenait plus à eux, si ce n’est pour vérifier la sincérité de leur conversion.
Les Nazis, au contraire, ont massacré les Juifs de toutes « obédiences », y compris ceux qui s’étaient convertis à d’autres religions, ou qui étaient issus de parents convertis.