Conversation 5171 - Prieres cabbalistiques

Anonyme
Mercredi 12 mars 2003 - 23:00

Mn grand père (z"l ) venait d'un shtetl hassidique de Pologne. Conformément à la tradition familiale je prie donc selon le nossah "sfard". Juste avant les débuts des Psouqé dzimra (avant donc Baroukh Shéamar) figure la fameuse cavana cabbalististique : "lechem yihoud koudcha ouchkhinté..."Je dois avouer ne pas en comprendre le sens (unir Dieu et la ckhina ?) et la trouve même douteuse du point de vue de l'unité divine. Du coup j'ai pris sur moi de ne jamais la dire.

1) En avais-je le droit sachant que contrairement au nossah ashkénaze cette cavana figure dans tous les siddourim sfard conforméméent à l'avis du Ari Zl. (voir également le siddour derav asher publié pour la première fois en 5548 à Lvov).

2) De manière plus général ne vaut-il pas mieux s'abstenir de toute prière directement cabbalistique quand on ne les comprend pas.

3) Mais quelle est la véritable signification de "lechem Yihoud Koudcha..." ?

Merci d'avance

Behatslaha

Rav Elyakim Simsovic
Samedi 15 mars 2003 - 23:00

1) Non, vous n'en aviez pas le droit, puisqu'on ne doit rien changer au minhag de ses pères.
2) Il n'est pas nécessaire de comprendre plus que le sens simple des mots.

Je voudrais, aussi délicatement que possible, vous mettre en garde contre ce piège de la vanité qui consiste à soumettre notre conduite à notre compréhension. La compréhension fondamentale, c'est que la compréhension est toujours limitée, si on la mesure à l'infini du sens. Or, je dois mesurer mon intelligence par ce que la Thora dit et non mesurer la Thora par ce que mon intelligence comprend. Et quand je sais que je ne comprends pas, il faut manifester beaucoup de reconnaissance parce qu'alors je peux chercher. Et parfois, cette recherche peut causer beaucoup de larmes et c'est un bienfait pour l'âme.

3) Je ne peux pas - à supposer que j'en aie la compétence - me livrer "en ligne" à des explications qu'on ne donnerait peut-être pas de vive voix. La formule que vous citez (et qui fait aussi partie de mon rite) signifie globalement la chose suivante : le monde tel qu'il est ne témoigne pas de l'existence de son Créateur. Une autre manière de le dire est que la Présence de Dieu, la Chékhina, est en exil. Notre prière est de ramener la Chékhina de son exil, faire que la réalité du monde tel qu'il est devienne compatible avec la vérité du monde telle que nous la connaissons et qu'il en soit ainsi non seulement au titre de la foi mais aussi au titre d'une évidence accessible à tous.

Anonyme
Dimanche 16 mars 2003 - 23:00

Merci pour votre rapide réponse à ma question (n°5171). Pour autant, si je vous suis, les hassidim du Besht n'aurait jamais dû troquer l'ancestral noussah ashkénaze au bénéfice de celui du Ari. Comment expliquez une décision qui est en condradiction avec la Halakha que vous m'avez citée et qui établit de ne jamais rien changer au Minhag des pères ? D'autre part la question du Yihoud touche non pas simplement au dévoilement de Dieu sur cette terre mais bel et bien à une certaine idée du mode d'action de la divinité qui agirait via 10 séfirot, comme le stipulent les cabbalistes(la chekhina étant identifiée à Malkhout). Or même Rabbi Moché Cordovero ne considère pas que nier l'existence des sefirot constitue une hérésie. Si vous ne désirez pas que votre réponse apparaisse librement sur cheela, faites le moi savoir je vous laisserai alors mon mail.

Hag Pourim

Rav Elyakim Simsovic
Mercredi 19 mars 2003 - 23:00

a. J'ai déjà indiqué dans une réponse précédente que l'on peut changer du rite "classique" au rite du Ari zal, (cf. Téfila kéhilkhata chap. 4 et note 5).

b. Ce que vous dites à propos du Yihoud est inexact et imprécis. Ce n'est pas ici le lieu de développer cette question, car il faudrait beaucoup de préalables et de mises au point de vocabulaire. Je ne sais pas ce que signifie "nier l'existence des séfiroth" comme je ne sais pas ce que signifie "affirmer leur existence". Admettons, pour les besoins de la cause, que toute science possède son jargon propre pour faciliter la conversation, comme la notation algébrique, par exemple.
(Soit dit en passant, Rabbi Mochè Cordovéro est antérieur au Ari zal, de peu, mais antérieur)

c. Le Chla Haqaddoch, rabbi Yéchayahou Horovitz, écrit : "le verset 'connais le Dieu de ton père' concerne la connaissance de Ses Noms, béni soit-Il, et le secret de la Atsilout est le secret de l'étude de la sagesse de la Qabbala qui rend sage le naïf et qui n'a pas vu la lumière de cette sagesse n'a point vu de luminaire de sa vie ; ce n'est qu'alors qu'il comprendra et saisira le secret de Son unité bénit soit-Il et le secret de Sa Providence et ce que sont les attributs (toarim) mentionnés dans la Thora et qu'ignorent les philosophes. Heureux l'oeil qui a vu tout cela".

d. Si je dis que Dieu est Juge et qu'il est un Père miséricordieux, et qu'il est Roi du monde, cela signifie-t-il que je crois (Halila) à l'existence d'entités divines séparées Juge, Père, Roi ? Et lorsque le Midrach dit que Dieu se lève du Trône de Justice pour s'assoir sur le Trône de Miséricorde, cela signifie-t-il que je crois à la réalité (halila) de ce mouvement ?

e. Que signifie que la Chékhina est en exil ? Pourquoi la Chékhina et pas Lui ? Et que signifie que jamais la Chékhina n'a bougé du Mur Occidental ? Et que signifie le commentaire de Rachi sur le début de la paracha Térouma : Ils feront pour Moi un sanctuaire - Pour Moi : Pour Mon Nom ? Et qu'en ce jour-là Il sera Un et Son Nom sera Un et le dire de rabbi Elézer ben Horqénos : avant que le monde fut créé Lui et Son Nom étaient Un.
Pourquoi après avoir dit "Béni soit Celui qui a parlé et le monde fut", ajoute-t-on "Béni soit-Il" ? Et qu'ajoute le fait de dire ensuite "Béni soit Celui qui fait oeuvre de commencement" ? N'est-ce pas la même chose que "avoir parlé et le monde fut" ? et ne désigne-t-on pas par-là le Dieu unique créateur des mondes ?
Quelle relation y a-t-il entre toutes ces formules, quelle est la cohérence de l'ensemble, quel est le sens et le but de notre 'avoda ?

Pour répondre à ces questions, vous entendrez certains dire qu'il s'agit d'hyperboles poétiques ou des allégories ou des métaphores, supprimant ainsi toute possibilité de comprendre la signification exacte et précise du texte, à moins de pouvoir dire allégorie de quoi, métaphore de quoi ?

Dans ma réponse précédente, je ne crois pas avoir eu besoin d'utilser le vocabulaire des séfiroth pour expliquer le sens de la formule faisant à l'origine l'objet du débat. Je maintiens cette explication. Croire ou non dans l'utilité du langage incriminé n'y ajoute ni n'enlève rien.
Mais ce sont là des sujets d'étude longues et minutieuses ne serait-ce que pour commencer à en apprendre l'alphabet. Et comme le dit le rav Ashlag zatzal, les séfiroth sont précisément cela : l'alphabet d'un langage de la sagesse.

Anonyme
Mercredi 19 mars 2003 - 23:00

Merci pour l'ensemble de ces précisions (question 5214).

En espérant nous voir un jour en Israël et profiter de vive voix de votre enseignement

Rav Elyakim Simsovic
Jeudi 20 mars 2003 - 23:00

Amen, ken yéhi ratzone.