Conversation 9027 - L'etoile jaune et ses antescendants
Shalom,
Je voudrais poser une question d ordre historique.
Pourquoi a t on impose aux Juifs des le Moyen Age un insigne de couleur jaune ?
Pourquoi le jaune ?
Merci pour votre site.
Chez les Chrétiens, le jaune signifiait aussi trahison : Judas est représenté avec une robe jaune ainsi que les Juifs. C’est pourquoi en 1215 le Concile de Latran leur imposa une rouelle jaune sur leur vêtement, ancêtre de cette triste étoile jaune de sinistre mémoire. Vers la fin du Moyen Age, le jaune est lié au désordre, à la folie : les bouffons et les fous sont habillés en jaune (le nain jaune). Le jaune est associé à Lucifer, au soufre, et aux traîtres. Paradoxalement il correspond aux maris trompés alors qu’originellement il indiquait le trompeur.
Référence : HISTOIRE ET SYMBOLISME DES COULEURS
J. Peyresblanques, Collège des ophtalmologistes des Hôpitaux de France
Cher Rav,
Pour compléter votre interprétation du jaune, couleur imposée aux Juifs par les Chrétiens, je voudrais ajouter que le jaune est parfois aussi le symbole de l'orgueil.
Dans cette optique, les Chrétiens voulaient montrer l'orgueil de ceux qui se "prétendaient" le peuple élu, cette notion, dans le christianisme, ayant été abolie pour créer le concept de "verus Israël" les définissant(le vrai Israël) ; cela signifiait donc implicitement que les Juifs faisaient fausse route en se sentant investis d'une mission particulière.
Ce n'est pas mon interprétation : j'ai cité mes sources.
J'ai un problème avec votre proposition, car l'Eglise n'a jamais remis en cause le fait qu'Israël restait le peuple élu selon la chair ni que, selon le mot de Paul, "le salut vient des Juifs". Il n'y avait donc pas place à l'orgueil en la matière. L'Eglise affirmait seulement que la Nouvelle Alliance avait supplanté l'ancienne car les Juifs avaient trahi. Et il en découle bien entendu nombre de conséquences.
Avez-vous des sources pour soutenir votre thèse ?
Cher rav,
Le jaune est notamment interprété comme couleur de l'orgueil dans le Dictionnaire des Symboles publié aux Editions Robert Laffont (Coll "Bouquins)
Le christianisme étant une religion "du salut" (rappelons nous le célèbre "hors de l'Eglise point de salut"), les paroles de Paul ont du "évoluer" à travers les âges... De plus, les positions de l'Eglise sont parfois éloignées des premiers textes : dans ce que je connais, l'Eglise considère que le salut vient de Jésus seul et que les Jufs n'auront de salut que s'ils se "convertissent" à la foi chrétienne.
De plus, l'Eglise interprète l'Exil comme, h'as véshalom, un signe de l'abandon de D envers Israël... En ce sens il ma paraît assez clair que le rôle de Peuple élu est tout à fait mis à mal.
Pour terminer, la plupart des théologiens chrétiens ont du "ménager" l'apport juif dans la mesure où Jésus était juif lui-même et que son enseignement est souvent très proche de notre Tradition. Alors, même si officiellement l'Eglise reconnaît les Juifs, elle n'en considère pas moins que l'Alliance est rompue et qu'il serait prétentieux de leur part de se réclamer encore du titre d"élus".
Je ne pense pas que les deux interprétations se contredisent, elles peuvent très bien se compléter.
Shalom
Merci de vos précisions. Je ne dis pas que ce que vous dites contredit la source que j'ai indiquée ; je n'ai pas d'interprétation personnelle à ce sujet. Une remarque méthodologique :
"ont dû évoluer", "ont dû ménager" sont des affirmations qui ressemblent fort à des pétitions de principe et en la matière il est impératif de ne rien avancer qui ne soit fonder sur des preuves ou arguments irréfutables.
L'enseignement d'un Juif n'est pas nécessairement celui du judaïsme et s'il s'agit d'un renégat encore moins, même s'il cite nos sources, comme Spinoza, par exemple. Les mêmes mots et les mêmes phrases prononcées par un rabbin ou par un prêtre n'ont pas du tout le même sens.
Pour finir, dans les textes théologiques chrétiens et les disputations théologiques, l'accusation de perfidie, de trahison et d'aveuglement reviennent très souvent. Je ne me souviens pas - ce qui n'est pas une preuve mais un aveu - d'une accusation d'orgueil.
Cher rav,
Comme vous me l'avez conseillé, j'ai vérifié de sources sûres que la tradition chrétienne avait "réinterprété" Paul. On trouve donc une virulente accusation d'orgueil dans la IX° homélie de Jean Chrysostome qui prend ses sources de Paul lui même, notamment dans Romains 10 ; 3 où il est dit des Juifs que "ils n'ont pas compris comment D-ieu rend les hommes justes (i e "égaux pour J Chrysistome) devant lui" pour en conclure que 'ils ne sont pas soumis à l'oeuvre salutaire de D-ieu".
J'espère avoir été plus honnête ainsi. Toutefois, il est apparent que de l'accusation d'orgueil à celle de traîtrise il n'y a qu'un pas que certains Pères de l'Eglise (comme J Chrysostome) ont franchi.
Cordial shalom
Il y a en effet une différence entre le fait que le salut vienne des Juifs et le fait que des Juifs, individuellement soient sauvés ou non. Mais trève de discussion. Je ne crois pas que le sujet mérire davantage de dépense d'énergie
Merci en tout cas de vos intéressantes contributions.
Shalom,
Suite à la question 9149, selon E. Renant (philologue français, spécialiste des langues sémitiques) et son livre "Histoire du peuple d'Israël" (publié en 1888 si ma mémoire est bonne), la couleur jaune et le chapeau pointu imposés aux juifs du Moyen Age symbolisaient deux choses :
1°) leur qualité de créancier depuis que l'église chrétienne, lors du concile de Latran, interdit aux chrétiens les intérêts quant à la finance (Ronan explique que le jaune citron symbolisait le florin d'or - dollar de l'époque)
2°) et tout comme vous l'avez dis, les goyim pensaient qu'en donnant la couleur jaune aux juifs, la masse chrétienne y reconnaîteraient l'iconographie du traitre selon la représentation de Judas.
Quant au chapeau pointu, il permettait d'identifier le peuple juif dans la foule mais également, il implicitait les juifs comme des reclus de satan (pour paraphraser Renan.) A ce propos, l'etymologie de certains termes attestent de cette confusion des genres tel que le terme de "sabbat" donné pour définir les messes noires des sorciers.
Quant à la nature des relations de l'église et du judaïsme, il ne faut pas oublier que la thèse des chrétiens quant à Israël se résumait à ceci : en tuant Jesus, les juifs ont été condamné à l'Eglise. Phrase qui se retrouve dans les déclarations du concile de Trente, réaffirmant les dogmes du catholicisme.
Si les internautes s'intéressent à la question, voici quelques orientations bibliographiques :
- Histoire de l'antisémitisme de L. Poliakov, tome 1 et 2
- Les banquiers juifs et le Saint-Siège du XIIIe et XIVe siècle de L. Poliakov
- Psychanalyse de l'antisémitisme de R. Loewenstein
Merci pour toutes ces precisions.
Cordial Chalom