Conversation 19377 - Creer, acheter et faire son nid

NathanninNathan
Lundi 27 septembre 2004 - 23:00

Shalom Rav,

Je sais qu’il ne faut pas se focaliser sur des questions de vocabulaire, mais que signifient קִנְיָן et ses dérivés?
Suivant la méthode que vous proposiez (cheela 17382), j’ai relevé les occurrences suivantes dans le texte :
(Ber 4 :1) קַיִןִִִִקָנִיתִי אִיש אֶת־ײ
(Proverbes 8 :22) קנני ײ ראשית דרכו קדם מפעליו מאז
(1ère prière avant la lecture du Shema le matin) קִנְיָנֶיךָ מָלְאָה הָאָרֶץ
(Idem) כֻּלָם עוֹשִׂים … רְצון קוֹנֵיהֶם
(Prière des patriarches, shmona esre) קוֹנֵה הַכּל
Et je n’ai pas trouvé d’explication chez Rachi.
Selon le traducteur, ces mots sont rendus par “créer”, “acquérir” (d’où provient actuellement “acheter”, je suppose).
Il y a aussi le mot קֵן, nid, qui s’en rapproche… Bref, je cherche et ne trouve pas. Pourriez-vous m’éclairer, s’il vous plaît ?

Rav Elyakim Simsovic
Jeudi 30 septembre 2004 - 23:00

Evitez d'écrire en hébreu. Beaucoup de Cheelanautes ne disposent des polices appropriées et votre texte leur est illisible, sans parler de ceux qui ne lisent pas encore l'hébreu.
Que voulez-vous faire ? Etablir le champ sémantique ?
On ne peut évidemment pas dire que Dieu "achète" les cieux et la terre. Le verset Qoné chamayim vaarets doit donc signifier autre chose.
Qinyane signifie d'abord "possession". D'une manière générale - sauf pour Dieu - pour posséder il faut avoir d'abord acquis. D'où un sens "dérivé" puisque Dieu ne possède pas seulement les cieux et la terre il les a créés. Pourquoi Avraham dit-il donc Qoné et non Boré ? C'est peut-être qu'il parle devant des gens qui peuvent comprendre l'une des notions mais pas l'autre ? Ou encore qu'il existe des thèses paiennes selon lesquelles les dieux se seraient désintéressés de la terre après l'avoir créée et qu'ils faut donc les amadouer avec des présents pour qu'ils soient propices et favorables. Qoné rétablit donc une relation immédiate entre le monde et le Dieu d'Abraham. De plus, dans le contexte, il s'agit de dire à l'interlocuteur "que peux tu me donner que je ne possède pas déjà puisque je suis au service de Celui qui possède tout et que Lui seul peut me donner".
Par ailleurs, "qinyane" ne désigne pas la transaction commerciale que nous appelons achat ou troc (peu importe qu'on donne pour l'objet ou le terrain ou l'immeuble une valeur monétaire ou un bien en échange). Fixer le prix, payer, établir un contrat, faire signer des témoins, tout cela ne constitue pas encore le qinyane, qui est en fait l'effectuation du "geste du propriétaire", Soulever l'objet, faire marcher l'animal à la manière usuelle, en le tirant ou en le poussant, verrouiller ou déverrouiller la porte, parcourir le domaine. Autrement dit, "faire comme chez soi".
C'est cette expérience d'être acquis à lui-même et qui n'a plus d'effort à faire pour mériter d'être qui est le handicap de Caïn à la naissance. Le monde est à lui, héritier unique, qui tout d'un coup découvre qu'il a un rival avec qui il faudrait partager.
Quand au nid, c'est bien sûr le plus petit "domaine" qui récapitule à la fois la génération, le nid que l'oiseau construit, et la possession.
Et le sentiment éprouvé par celui qui est souffre de ce que possède son prochain, la jalousie est la qinéa.
L'exclusivité de la relation à quelqu'un est sémantiquement proche de cette notion. On pourrait exprimer la distinction - en français - par "être jaloux de" et "être jaloux pour".
Il reste, du point de vue de la méthode, que c'est la première occurrence d'un terme qui contient le principe de sa signification.

NathanninNathan
Dimanche 3 octobre 2004 - 23:00

19377 Ca s'écarte un peu du sujet de mon étude actuelle, mais puisqu'on parle de le Qinea, qu'en est-il du "Dieu jaloux" du Décalogue? Est-ce la traduction adéquate, ou une déformation du message originel?

Moadim le simha

Rav Elyakim Simsovic
Dimanche 10 octobre 2004 - 23:00

Il vaudrait mieux dire "exclusif".