Conversation 6472 - Croire après le deuil
ma nièce- 20 ans- dont la mere est morte à 50 ans apres un an de souffrance, ne croit plus en D-ieu ; comment faire et quoi dire?
On n'a pas coutume de faire des remontrances aux personnes frappées par la souffrance. Et se remettre d'un deuil prend un certain temps. Certaines personnes, avant que la mort ou le mal les touche de près, vivent comme s'il existait deux mondes : le leur et celui des autres. Le réveil est parfois brutal. Aucun raisonnement ne met à l'abri de la réalité. Nous avons enterré il y a deux jours l'un des Anciens de Herzlya, rescapé de la Choa et qui a été frappé voici quelques années d'un accident cérébral qui lui a ôté l'usage de la parole. Son plus jeune fils, au nom de tous les frères, a prononcé une oraison funèbre, rappelant les mérites de son père et la manière dont il n'a jamais cessé, malgré toutes les épreuves qu'il a dû affronter et surmonter, de servir son Créateur par l'étude et la bienfaisance et comment lui et ses frères avaient appris de lui. Le grand rabbin de Herzlya, le rav Yakubowicz chlita, a dit entre autres : il laisse après lui des fils qui continueront son effort et cela aussi lui sera compté en mérite auprès du Créateur.
Je crois que c'est Hanna Arendt qui, disant à son rabbin qu'elle avait perdu la foi après la Choa, s'est entendu répondre : qui te la demande ? L'important, ce n'est pas ce que l'on croit mais ce que l'on est et ce qu'on fait. Si la croyance était primordiale, nous n'aurions pas besoin d'avoir un corps mortel. C'est par lui que nous sommes insérés dans le monde. Il est transitoire et éphémère mais c'est l'instrument de notre pouvoir d'intervention dans le monde. Face à certaines expériences, notre intelligence vacille. C'est alors la conscience morale qui doit venir à son secours. Nous, Juifs, nous savons par expérience des choses qui pour d'autres sont des objets de foi. Nous sommes, nous, le peuple d'Israël, existentiellement, depuis la sortie d'Egypte, la preuve de l'existence de Dieu et de la réalité du salut. Et depuis la question lancinante qui se pose à chacun de nous n'est pas ; crois-tu en Dieu ? mais ce Dieu qui t'a fait sortir toi et tes pères d'Egypte, peut-Il croire en toi ?