Conversation 8248 - La religiosite de Jesus

Anonyme
Samedi 19 juillet 2003 - 23:00

Tout d'abord un grand merci (toda raba) pour toutes vos réponses précédentes qui m'aident beaucoup à progresser.
Dans l'édition Verdier du Pirqé Avot (Traité des Pères commenté), il est cité p.114 un passage de Sanhédrin 107 b "Jésus s'était montré trop familier avec son maître, Josué fils de Perahia et celui-ci le repoussa ; c'est pourquoi Jésus finit par construire son propre culte" . Il est précisé que ce passage figure parmi les passages censurés du Talmud.
Vous avez précisé que l'édition Steinsaltz n'est pas censurée malheureusement, nous n'avons de librairie Juive à Toulouse et je crains de ne pouvoir le consulter. J'aurais bien aimé en savoir plus sur ces fameux passages censurés.
Lorsqu'on lit les "Actes des Apôtres" et les Epitres, on a plutôt l'impression que ce sont les disciples puis Saint-Paul qui ont créé un véritable culte autour de Jésus, mais que ce dernier était authentiquement Juif au sens où on le voit respecter et célébrer les fêtes, s'entretenir de la Torah avec des docteurs de la Loi, aller au Temple, même si c'est pour y faire un scandale avec les marchands.
Ma question est Jésus était-il un Juif réformateur ou un Juif Libéral avant l'heure qui aurait prêché pour un assouplissement des règles (l'homme a-t-il été créé pour le shabbat ou le shabbat pour l'homme ?), une foi authentique (pour la pureté du coeur et détachée du mercantilisme du Temple) et une ouverture aux non-juifs (il traite la Samaritaine et le soldat romain avec la même bonté que ses condisciples) ? A-t-il réellement souhaité fonder une nouvelle religion ?

Rav Elyakim Simsovic
Lundi 1 septembre 2003 - 23:00

Ni réformateur, ni libéral, ni rabbin, ni prophète. Il n'y avait aucun "mercantilisme" au Temple et il n'y a rien de fondamentalement nouveau dans rien de ce que les évangiles lui attribuent. Je ne peux pas me livrer ici à des analyses de détail, mais il s'agit dans tous les cas de ce qu'on appelle des apologues homilétiques, autrement dit un discours hautement symbolique et tissé d'allusions destinées aux seuls "avertis" qui possèdent les clés et l'adresse des serrures.
Ensuite, lorsque les non-Juifs se sont emparés de ces textes et qu'ils les ont lus au pied de la lettre (qui accuse qui de s'en tenir à la lettre et d'oublier l'esprit...), qu'ils ont fait du concept hébraïque de fils de Dieu ("Israël est mon fils aîné") un concept païen "Dieu le Fils" tout cela a été déformé.
Par exemple : les évangiles ont besoin de la scène des marchands du Temple à cause d'un verset des prophètes annonçant qu'aux jours du Messie il n'y aura plus de marchand dans la maison de Dieu. Ce qui demande d'ailleurs à être expliqué, d'autant plus que le terme dont se sert la Bible pour désigner le marchand en question est "Cananéen" comme dans le Echet hayil, pour ceux qui connaissent, que nous disons le vendredi soir en l'honneur de nos épouses - et de la première d'entre elles, notre Mère Sarah - "elle a tissé un drap et le vend et elle donne une courroie au Cananéen (=marcand)".
C'est la Thora des Hébreux qui sait que le Chabbat a été donné à l'homme et non l'inverse et on n'a besoin d'aucun assouplissement des règles en la matière. Il faut être Romain ou de mentalité romaine (ou gréco-romaine, come la lutte) pour croire que Dieu ne connaîtrait pas l'âme de ses créatures et changerait d'avis quant à la loi du salut qu'Il leur a proposée, les faisant retomber dans l'enfance irresponsable après les avoir élevés (au double sens du mot) jusqu'à l'âge adulte.