Conversation 84554 - Unité et certitude de Dieu

Serge PASTORINI
Jeudi 3 octobre 2019 - 10:00

Chalom Rav Samuel Elikan

1) Maïmonide écrit dans « Le guide des égarés » (chap. 50 1e partie) : « Dieu n’a point d’attribut essentiel sous aucune condition. Celui qui croirait qu’Il est un, possédant de nombreux attributs, exprimerait bien, par sa parole qu’Il est un, mais dans sa pensée il Le croirait multiple. »

Donc (si j’ai bien compris) on ne peut ni ne doit donner une définition ontologique de D.ieu (par ses attributs). On n’a pas le droit de dire que D.ieu est omniscient, omniprésent, tout-puissant, etc. Sommes-nous d’accord ?

2) Pourtant, je puis assurément dire que vous êtes érudit, patient (vous répondez à mes questions bien qu’elles soient stupides) et généreux (la longueur de votre réponse 69994, par exemple, montre que vous donnez de votre temps sans compter) sans que ces qualités attributives fassent de vous un être multiple, non ? Vous restez celui que vous êtes, dans votre complexe unité. Alors ?

3) Toujours dans le chap. 50 1e partie, l’auteur écrit au sujet de la certitude : « Il ne peut y avoir de croyance que lorsqu’il y a eu conception ; car la croyance consiste à admettre comme vrai ce qui a été conçu et à croire que cela est hors de l’esprit, tel qu’il a été conçu dans l’esprit. S’il se joint à cette croyance la conviction que le contraire de ce que l’on croit est absolument impossible et qu’il n’existe dans l’esprit aucun moyen de réfuter cette croyance, ni de penser que le contraire puisse être possible, c’est là de la certitude. » Cette définition de la certitude n’est-elle pas limitée à celui qui la pense ? Si c’est le cas, quelle valeur cette certitude a-t-elle pour autrui ? Avoir la certitude d’une chose ne fait pas que cette chose soit. Dès lors, je ne comprends pas la portée de cet écrit.

Respectueusement

Avec mes remerciements

Rav Samuel Elikan
Jeudi 12 décembre 2019 - 21:18

Shalom,

1) Selon Maïmonide, on ne peut pas dire qui est Dieu, mais on peut dire ce qu'Il n'est pas d'une part et ce qu'Il fait, Ses actions, d'autre part. En disant qu'Il est Tout-Puissant, on définirait alors Ses actions, et non pas Son Être qu'on ne peut pas définir, si on peut parler de la sorte.

2) Vous décrivez des qualités, des vertus que vous avez déduit à mon propos, selon mes actions. Mais cela ne me définit que très très partiellement. Par ailleurs, il existe en moi, comme en vous et comme en tout le monde, plusieurs qualités et défauts, plusieurs vertus qui forment une multiplicité de notre identité, de notre Moi. Quoi qu'il en soit, pour pouvoir savoir qui je suis réellement il faut que vous soyez moi, or ce n'est pas (encore ?) possible. A fortiori pour Dieu, on ne peut pas être Dieu, donc on ne peut même pas comprendre ce que cela veut dire.

Par ailleurs, Maïmonide ajoute qu'étant donné que Dieu a créé le Monde, Ses vertus ne peuvent pas être les mêmes que les nôtres, puisque nous ne pouvons pas créer de l'étant à partir du néant (jusqu'à preuve du contraire...). Et donc tous les attributs que nous connaissons sont "humains", or comment pourrait-on les appliquer à Dieu ? Déjà pour les animaux qui peuvent nous être assez semblables, nous ne savons pas forcément définir ce qu'ils ressentent ou pas, à fortiori pour Dieu qui est Infini...

3) Beaucoup d'encre a été versée sur ce passage du Guide. Il s'agit là d'une définition universelle de l'acquisition de certitude dans la connaissance. Mais quand bien même, on sait de manière certaine, cela ne veut pas dire qu'autrui saura pour autant. Il devra faire ce même processus de prise de connaissance et de certitude. La fait de savoir de manière certaine reste un acte solitaire.

Cordialement,