Conversation 1160 - Importance des traditions orales et écrites

Anonyme
Lundi 12 août 2002 - 23:00

le judaisme attribue-t-il une importance majeure à l'écriture dans sa dimension écrite (Thora) ou plutôt à une tradition orale (Talmud) ?
Merci

Rav Elie Kling
Jeudi 22 août 2002 - 23:00

Il ne suffit pas de lire la thora pour saisir le judaisme. Apres tout, d'autres religions monotheistes se reclament, elles aussi, de la "Bible Juive", elles ne sont pas pour autant assimilables au judaisme. Celui-ci est donc une certaine maniere de lire la Thora. Cette lecture particuliere de la Thora fut transmise a l'origine oralement de generation en generation jusqu'au moment ou, pour des raisons historiques, les sages sentirent la necesste de la mettre par ecrit. C'est cette maniere juive de lire la Thora que l'on appelle le Talmud. Pour repondre concretement a votre question, si , a travers vos etudes, vous rencontrez une apparente "contradition" entre un verset de la Thora et l'interpretation qu'en donne le Talmud, c'est cette derniere qui aura force de loi. (L'un des exemples le plus connu est celui de la loi dite du tallion (oeil pour oeil...) que le judaisme, a travers le Talmud, interprete comme un dedomagement financier).
Un de mes maitres donna un jour l'image suivante: la loi ecrite est pour la loi orale ce que les notes prises par l'etudiant sont pour la conference. Au Sinai, D.ieu donna a Moise une longue conference: cest la Loi Orale. Parallelement, il lui dicta les notes a prendre: c'est la Loi Ecrite. Il est tout aussi risque de pretendre comprendre la seconde sans faire reference a la premiere que de vouloir reconstituer une conference magistrale uniquement sur les base des notes saisies dans le cahier de l'etudiant...
Cordial chalom

benyamine80
Mercredi 29 mars 2006 - 23:00

suite à la 1160

Chalom,

Je reprends une partie de la réponse du Rav Kling dans la question 1160 :

"Un de mes maitres donna un jour l'image suivante: la loi ecrite est pour la loi orale ce que les notes prises par l'etudiant sont pour la conference. Au Sinai, D.ieu donna a Moise une longue conference: cest la Loi Orale. Parallelement, il lui dicta les notes a prendre: c'est la Loi Ecrite. Il est tout aussi risque de pretendre comprendre la seconde sans faire reference a la premiere que de vouloir reconstituer une conference magistrale uniquement sur les base des notes saisies dans le cahier de l'etudiant..."

1) Ma question est de savoir aujourd'hui où peut consulter le "cours magistral" ? Est ce la Guémara ou le Talmud ? J'entends par là, où peut consulter toutes les lois qui ont été transmises Oralement à Moise sans que les considérations et commentaires rabiniques rentrent en jeu.

En clair, où se trouvent toutes les lois midéoraita (venant de D'ieu) qui ont été transmises de facon orale ?

2) à quel moment l'a t'on mise à l'écrit ?

3) pourquoi ne doit-on pas douter qu'il y a eu de la perte d'informations entre le moment où a eu lieu le cours magistral et la transmission d'un professeur à l'autre pendant des milliers d'années ? Ne peut-on pas dire avec certitude que les élèves qui ont assité au cours magistral du 1er professeur avait certainement des infos plus précises et plus pointues que les élèves du 60è professeur ?

Qu'à D-ieu ne plaise ne voyez de provocation dans ma question mais juste une moyen de comprendre le mode de transmission et surtout de faire distinction entre les halakhot qui découlent de D'ieu en personne et de celles qui découlent des Sages.

Merci beaucoup par avance.
Cordial Shalom

Rav Elie Kling
Dimanche 2 avril 2006 - 09:01

Le 'cours magistral ' dans sa version premiere du Sinai est bien sur introuvable aujourd'hui. Il a ete transmis le plus fidelement possible par Moise lui-meme a son frere Aaron , a Josue, aux responsables du peuple et elle fut transmise ensuite de generation en generation. (Se sont conservees egalement les 'midot sheatorah nidrechet bahem', c'est a dire les cles des codes d'interpretation permettant de reconstituer du mieux possible la conference orale a partir du texte ecrit). Lorsqu'apres la destruction du Temple (entre 70 et 500), les sages deciderent sa mise par ecrit pour les raisons historiques que l'on sait, ils firent un travail tres pointu de recherche des sources, de confrontations des differentes traditions, d'evaluation de ce qui est 'deoraita' et ce qui ne l'est pas, etc... Cette recherche est consignee dans les deux talmoudim et il est tres clair pour tout celui qui ouvre le talmud que nos sages ne se sont pas contentes de consigner leurs conclusions mais ont tenu a garder les comptes-rendus de cette recherche jusque dans ses derniers details (remarquez par exemple comment les sages de l'epoque talmudique indiquent l'auteur des traditions: "x dit au nom de y qui dit au nom de z , etc... en remontant le plus loin possible). Lorsque , dans la discussion talmudique, les sages aboutissent a une impasse, c'est-a-dire qu'il n'est pas possible d'authentifier une tradition plus qu'une autre, ni par les temoignages de disciples, ni par l'argumentation logique, c'est le vote a la majorite qui determinera la conclusion hilhatique ou les principes de psika (notifiant par exemple que pour tel ou tel domaine, tel rav etant considere comme specialiste, la halakha sera fixee comme lui). Vous dire que cette recherche minutieuse et transparente est a l'abris d'erreurs et que la conference d'origine a pu etre reconstituee a la virgule pres ne serait pas serieux. Mais la Torah elle-meme nous indique comment trancher en cas de doute et accorde suffisamment d'autorite aux sages pour que ces derniers puissent le faire en son nom.
Cordial chalom