Conversation 2200 - Titre et contenu de la Parachat Haye Sara

Anonyme
Samedi 2 novembre 2002 - 23:00

Bonjur,

Pourquoi la paracha Hayé sarah s'appel de cette façon alors que l'on parle d'evenement aux antipodes de la vie ..
La grotte (endroit de son enterrement),le sacrifice d'isthak(qui causa sa mort) et le remariage d'avraham.Pourquoi la vie de sarah? c'est ca la vie de sarah?Pourquoi ce mot "vie" alors que d'autres mots auraient ete plus juste..

Rav Chaoul Sillam
Dimanche 10 novembre 2002 - 23:00

Vous avez raison:une lecture rapide de la Sidra de ‘Hayé Sarah sollicite une interrogation presque inévitable : comment le nom de la Sidra est-il compatible avec les sujets qui y sont abordés ?!
Le premier sujet : l’enterrement de Sarah Iménou, va-t-il de pair avec ‘Hayé Sarah : « la vie de Sarah ?! » le second : le mariage de Its’hak Avinou, se terminant par les termes : "Ainsi Its’hak se consola d’avoir perdu sa mère" (Béréchit 24,67), ne traduit-il pas un oubli de Sarah Iménou, remplacée par Rivka Iménou ?! Enfin, la troisième partie de la sidra, contant le remariage d’Avraham Avinou avec Ketoura – Hagar, puis le détail des descendants de Ichmaël, ne représente-t-elle pas l’antithèse du message de Sarah Iménou : « renvoie cette esclave et son fils, car le fils de cette esclave n’héritera point avec mon fils, avec Its’hak » (Béréchit 21,10) ?!
Afin de répondre à ces interrogations (à la lueur des explications du Rabbi de Loubavitch, Likouteï Si’hot Vol 15), rappelons une notion fondamentale abordée par la 'Hassidout : seul ce qui est foncièrement vrai est éternel, et comme nous le dit Chlomo Hamélé’h dans ses Proverbes (12,19) : « la vérité est éternelle ; le mensonge dure un clin d’œil » ; idée développée par le Tanya (voir Likouteï Amarim Chp.13).
L'idée de vie est éternelle, car intimement liée aux notions de vérité et d’éternité ; en effet, l’eau vivante, nécessaire à la purification de l’impureté mortuaire, ne peut provenir des « sources mensongères » (voir Traité de Para 8,9). Qu’est-ce que ces « sources mensongères » ? Ce sont des sources arrêtant leur cours ne serait-ce qu’une fois tous les sept ans (Idem). Et par conséquent inversement : ce qui n’est pas éternel ne peut faire partie de ce qui est appelé « vie ».
Qui ne connaît l’histoire du touriste qui, après avoir exprimé son étonnement au vu des inscriptions sur les pierres tombales du cimetière local : ici gît untel, mort à l’âge de 6 ans, ici gît untel, mort à l’âge de 11 ans, ici gît untel, mort à l’âge de 2 ans ; reçut l’explication suivante du Rav de la communauté : nous n’inscrivons que la durée réelle de la vie : celle de l’accomplissement des Mitsvot et de l’Étude de la Torah ?
Il ressort de tout cela, que ce qui est appelé « ‘Hayé Sarah », représente quelque chose d’éternel (chez Sarah Iménou la totalité de sa vie, vouée au service Divin, est éternelle). Cette éternité ne peut être prouvée qu’après la mort, lorsque la marque laissée s’avère indélébile, lorsque le message réside, malgré la disparition du messager C’est pourquoi on ne peut vraiment parler de ‘’Hayé Sarah’.. qu’après la disparition de Sarah Iménou.
Nous verrons plus loin que notre Sidra, plus que toute autre, témoigne de l’empreinte ineffaçable du message de Sarah Iménou, au point de changer totalement même les conceptions humanitaires d’Avraham Avinou, remplacées dès le décès de Sarah, par une conception de loin plus profonde, celle de la specificite et de la centralite du peuple juif (oui,oui, vous avez bien lu : nombre de conceptions humanitaires auxquelles l’hypocrite éducation française nous a habitués, vont à l’encontre des conceptions de la Torah. La pitié à l’égard de ce pauvre enfant palestinien qui, envoyé par ses parents jeter des pavés tueurs sur des soldats Juifs, vit ses jours raccourcis, n’est pas une valeur juive, elle provient de la conception « Amalékite », qui enfanta le christianisme, qui à son tour enfanta le nazisme ; selon laquelle le peuple Juif doit être (D.ieu nous en préserve), effacé de la surface de la terre).
Ne nous y méprenons pas. Il ne s’agit pas d’un nationalisme mal placé, mais d’une compréhension de l’ordre du monde, selon lequel le peuple juif, lumière des nations, a le devoir de rapprocher l’humanité vers la connaissance du D.ieu suprême. Quiconque de par les nations, ne captera pas ce message, verra son nom effacé de l’histoire. Mais laissons cela de côté pour le moment, nous y reviendrons plus tard.
La Torah nous conte, à la fin de l’épisode du mariage de Its’hak et Rivka : « Il la conduisit dans la tente de sa mère Sarah » (Béréchit 25,67). Et nous disent nos Sages (voir Rachi, Idem) : on peut interpréter ainsi ce verset : « Il la conduisit dans la tente, et voici sa mère Sarah ». Le symbole de la présence de Sarah fit soudain son apparition, car la bougie qui restait allumée d’un Chabbat à l’autre, la bénédiction dont jouissait la pâte, ainsi que le nuage de Che’hina qui séjournait au-dessus de la tente, au temps où Sarah était vivante, réapparurent. Ceux-ci avaient disparu momentanément pour que tous soient témoins, au moment voulu, de la grandeur de Rivka Iménou. Leur réapparition lors de la venue de Rivka prouva de plus l’éternité de la présence de Sarah Iménou, de par l’empreinte indélébile de son action, dans le couple nouvellement fondé par son fils Its’hak. On comprend pourquoi le consolement qu’Its’hak trouva en sa femme Rivka, ne représente en rien une trahison ou un oubli de sa mère, mais au contraire, le côté éternel de son message.
Qu’en est-il cependant du long récit précédant l’arrivée de Rivka dans la tente de Sarah, contant de façon très détaillée la mission d’Eliezer, envoyé par Avraham Avinou chercher femme pour son fils Its’hak ? Qu’en est-il encore de l’épisode du remariage d’Avraham avec Hagar, et des détails des générations de Ichmaël ? En, quoi ces récits sont-ils liés au « titre » de notre sidra (l’habitude prise de donner aux différentes Sidrot les noms qui leur sont attribués jusqu’à nos jours, est un « Minhag Israël » faisant partie intégrale de la Torah) : « la vie de Sarah »?

Pour répondre à ces interrogations, une nouvelle introduction s’impose. En quoi le travail divin de Sarah Iménou différait-il de celui d’Avraham Avinou ? Que représente pour nous Avraham Avinou, et que représente sa femme Sarah (qui d’après nos Sages, possédait un niveau de prophétie supérieur à celui d’Avraham Avinou !) ?
Avraham Avinou n’est pas le père du seul peuple juif. Ichmaël lui aussi est fils d’Avraham ; et pas uniquement tel un « vilain petit canard ». Le Talmud, traité de Sanhédrin (89) explique les termes utilisés par D.ieu lors de l’injonction du sacrifice : « prends ton fils, ton fils unique, celui que tu aimes, Its’hak » : D.ieu demanda tout d’abord à Avraham Avinou d’immoler son fils. Avraham répondit qu’il avait deux fils. D.ieu lui dit alors : ton fils unique. Avraham rétorqua : chacun des deux est le « fils unique » de sa mère ! D.ieu reprit : celui que tu aimes. Avraham reprit : « j’aime mes deux fils ! ». D.ieu demanda alors à Avraham explicitement que soit immolé Itsh’ak. Nous comprenons qu’un lien profond relie Avraham Avinou non seulement à son fils Its’hak, mais encore à Ichmaël.
Sarah Iménou, quant à elle, n’est la mère que de l’unique peuple Juif. Elle n’enfanta en effet que Its’hak ; et même Essav, issu d’Its’hak, est considéré par nos sages (Kidouchin 18a), non comme un non-Juif, mais comme un Juif apostat.
La différence entre Avraham Avinou et Sarah Iménou n’est pas uniquement généalogique. Leur service divin lui aussi diffère énormément : Avraham Avinou publia le monothéisme chez tous, qu’ils soient ou non méritants, qu’ils soient ou non raffinés spirituellement, y compris chez les nomades se prosternant à la poussière de leurs pieds. Avraham Avinou incarne ici bas la vertu de ‘Hessed, la bonté sans borne. Sarah Iménou, elle, incarne « l’influence sélective » ; la Haggadah qui suit, rapportée par le Talmud (Baba Batra 58a), illustre parfaitement cette distinction :
« Rabbi Banaa signalisait les emplacements mortuaires. Lorsqu'il arriva à proximité de la sépulture d’Avraham Avinou, il trouva Eliezer, le serviteur d’Avraham, qui se tenait à l’entrée de la grotte. Rabbi Banaa lui demanda ce que faisait Avraham Avinou, ce à quoi lui répondit Eliezer : Avraham est allongé dans les bras de Sarah, qui lui vérifie la tête ».
Que signifie cette Haggadah plus que surprenante ? On ne peut en aucun cas envisager l’idée qu’un détritus quelconque soit lié à Avraham Avinou. Un éclaircissement s’impose :
Le Admour Haemtsaï de ‘Habad, Rabbi Dov-Ber, dans son livre « Torath ‘Haïm » (voir aussi Séfer Halikoutim Tséma’h Tsédek - Ere’h Avraham Avinou p.158, 159 et 162), explique ainsi cette Haggadah : Avraham Avinou est intimement lié au peuple juif, cependant (comme vu précédemment), il existe un lien indéniable entre Avraham et les nations. (Ce lien est cependant extérieur, et non intime. Le nom de base d’Avraham est « Avram », qui signifie « père du haut peuple » (Berah’ot 13a) ; le nom « Avraham » signifiant « Père de nombreux peuples » (voir Idem Rachi), ne provient pas de l’essence du Patriarche, il est dû à un rajout plus tardif).
Outre le lien avec Ichmaël, poursuit le Admour Haemtsaï, Avraham Avinou, d’après la Kabbale, est le père des convertis. Sans l’influence secrète et imperceptible d’Avraham Avinou, un non-Juif, ne saurait rejoindre le judaïsme. Sans cette influence métaphysique, un non-Juif ne pourrait se réfugier sous les ailes de la Che’hina, ne pourrait se convertir ; un abîme séparant le niveau spirituel du non-Juif avant sa conversion, de celui d’après la conversion. Avraham Avinou dirige secrètement le candidat potentiel vers les chemins de la Divinité.
Les liens respectifs d’Avraham Avinou avec le peuple Juif d’une part, et avec les non-Juifs, dans le chemin de leur conversion (après la conversion, un non-Juif est Juif à part entière !), de l‘autre, sont symbolisés par les relations tête-membres, dans lesquelles la vitalité issue de la tête est nettement ressentie dans les membres , pour les premiers ; et les liens tête-cheveux, pour lesquels seule une très faible vitalité est perceptible (tout système nerveux y étant absent ), pour les derniers).

La Haggadah précédente prend maintenant une tout autre tournure : Sarah Iménou, vérifiant les cheveux d’Avraham Avinou, exerce en fait une sorte de censure dans la volonté illimitée d’Avraham Avinou de faire pénétrer les Nations sous le drapeau d’Israël.
La même Sarah qui comprit l’importance du renvoi d’Ichmaël pour le bienfait d’Its’hak et de sa postérité, empêche en fait Avraham de donner libre cours à son profond désir d’exercer chez chacun l’influence cachée dont nous avons parlé. N’oublions pas – soit dit en passant que nos Sages considèrent supérieur le niveau de prophétie de Sarah Iménou à celui même d’Avraham Avinou.
Les poux, d’après la Kabbale, représentent les « dix sphères de la Kelipa », en d’autres termes : les forces spirituelles du mal, ne sauraient tirer leur vitalité d’Avraham Avinou, la Kedoucha. Les cheveux, oui ; les poux, non ! Sarah Iménou ne permet qu’à de « grandes âmes » de rejoindre le judaïsme. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nombreux sont les convertis ou les descendants de convertis figurant parmi nos Tsadikim :
Ruth, le prophète Ovadia, Chemaya et Avtalyion, Onkelos Haguer, Rabbi Akiva, Rabbi Méïr, et autres…
En conclusion : Sarah Iménou symbolise la spécificité du peuple juif, qui ne saurait être altérée par le rattachement d’éléments indésirables.
D’après cela, il nous est à présent possible de reconsidérer toute la Sidra, Sidra exprimant en réalité la victoire des idées de Sarah Iménou sur celles d’Avraham Avinou, qui lui-même s’allie aux conceptions de Sarah après sa disparition :
· L’enterrement de Sarah Iménou, n’exprime en rien une disparition, bien au contraire, nos Sages expliquent qu’Avraham Avinou choisit l’emplacement de la sépulture de Sarah en raison de la présence des sépultures d’Adam et de ‘Hava, en cet endroit. L’idée exprimée ici par Avraham Avinou est la suivante : la postérité principale d’Adam et ‘Hava est le peuple juif symbolisé par Sarah. Le but de la création du monde est Israël « Béréchit Bara Elokim » : « Bichvil Israël Chenikrayim Réchit » (« au commencement » -D.ieu créa), signifie : pour le commencement, qui n’est autre qu’Israël – appelé commencement).
· L’histoire de la mission d’Eliezer, consistant à chercher femme pour Its’hak, exprime, elle aussi cette idée. En effet lorsque Avraham Avinou décida d’envoyer Eliezer, ce dernier proposa la main de sa fille : la réaction d’Avraham Avinou fut la suivante : « Mon fils, est béni et tu es maudit, cette union est irréalisable » (’Hayé Sarah 24,39). L’influence de Sarah, là aussi, est claire.
· La troisième partie de la Sidra, enfin, fait certes part du remariage d’Avraham Avinou, mais elle conclut (25,5-6) : « Avraham donna tout ce qu’il possédait à Its’hak. Quant aux fils des concubines (…) il les relégua loin d’Its’hak, son fils, vers l‘Orient ». Sur ce, explique le « Kéli Yakar », « Avraham Avinou déshérita ses autres fils, ceci afin d’accomplir la requête de Sarah (…), approuvée par D.ieu (…) ».
· Les générations d’Ichmaël sont, elles aussi détaillées, mais Ichmaël y apparaît comme étant le fils de Hagar, servante de Sarah.
On sait qu’Ichmaël fit Techouva (sa descendance, non). L’histoire de cette Techouva renforce, elle aussi, nos dires : Rachi –Vayera 21,10), rapporte que la principale faute d’Ichmaël au vu de laquelle Sarah exigea son renvoi, fut de prétendre, en tant qu’aîné, recevoir un héritage double de celui d’Its’hak, ne voulant reconnaître la supériorité de celui-ci. Dans notre Sidra, l’enterrement d’Avraham Avinou est ainsi décrit : « Il fut inhumé par Its’hak et Ichmaël, ses fils (…) ».
Rachi rapporte : c’est de ce verset que l’on apprend qu’Ichmaël fit Techouva. Il donna en effet, priorité à son frère Its’hak lors de l’inhumation d’Avraham Avinou.
Toutes les voies ici convergent : le message de Sarah Iménou, totalement assimilé, donne le ton. Le peuple juif est le peuple élu pour qui fut créé le monde.

Quel est, dans ce contexte, le rôle des nations ? Quelle est leur place dans ce monde essentiellement pro-Juif ?
Nous savons que sept Mitsvot furent données aux nations (voir Sanhédrin 56b et 59a). Le but de ces Mitsvot est de permettre au peuple juif d’accomplir Torah et Mitsvot, de rendre le monde plus humain, plus propice au service divin du Juif, dont le rôle est de faire résider ici-bas la lumière divine. Le non-Juif a pour but de rendre le monde habitable, le Juif d’y dévoiler la Che’hina.
On comprend pourquoi un non-Juif transgressant l’une des sept Mitsvot, est passible de mort (voir Encyclopédie Talmudique, Ere’h « Ben Noa’h »). Il n’y a en effet, plus de justification à son existence, devenue vide de sens (on notera que le Juif, permet, de par le seul biais de son existence, la présence divine ici bas, son âme étant de source divine. La vie juive a une valeur propre, indépendamment de l’action).
Cette idée est, elle aussi, exprimée dans notre Sidra.
Le Midrach raconte que lorsque Béthuel décida d’empêcher le départ de sa fille Rivka avec Eliezer, envoyé d’Avraham ; vint un ange qui le tua (voir Rachi 24,55). C’est pourquoi Béthuel disparaît soudain du texte, dès le milieu de la sidra.
Pour ne pas avoir accepté de remplir son rôle ici bas : Donner sa fille Rivka en mariage à Its’hak ; Béthuel se trouva immédiatement privé du droit de vivre.
On comprend qu’une politique pro-israëlienne serait propice aux dirigeants des nations beaucoup plus qu’à Israël même. Ces dirigeants auraient tout à gagner à prendre de la graine des péripéties de Béthuel.
Personnellement, la vue des actuels dirigeants des nations, l’un plus aussi antisémite et antisioniste que l’autre, ne peut que me remémorer la prophétie de Rabbi Chimon dans le Zohar, relative aux temps messianiques « en ces temps, le Saint béni soit-Il ressuscitera Adrianus, Lapianus, Nébu’hadnétsar, San’hériv, et autres rois qui prirent part à la destruction du temple. Ceux-cis seront les souverains de l’époque messianique. D’autres peuples s’allieront à eux ; alors D.ieu vengera son Temple » (Zohar 2ème partie p.58b).
« A la fin des temps, le Saint béni soit-Il revêtira ses habits de vengeance afin de châtier Edom pour avoir brûlé Son Temple et exilé Son peuple ; toutes les villes se rempliront de cadavres, dont se nourriront les bêtes féroces douze mois durant, et les oiseaux du ciel pour une période de sept ans (…) » (Zohar – 2ème partie p.89).

N.B. Vous parlez aussi du sacrifice d'Yts'hak, qui n'a pas de rapport avec notre Sidra mais plutot avec celle de Vayera.

Chalom . Shaul Sillam