Conversation 4520 - Philo juive a l'universite

Anonyme
Mardi 11 février 2003 - 23:00

Chers Rabanim
Que pensez vous des etudes de philosophie juive dispensees dans des universites?
Je sais qu'a l'universite Hebraique par exemple, aucun (ou presque) de ces enseignants n'est religieux. C'est sans doute tres different a Bar Ilan.
Fondamentalement, qu'elle peut etre l'apport de Rambam ou du Maharal expliques par un laic? Cela entrave-t-il le developpement religieux?

Rav Elyakim Simsovic
Lundi 24 février 2003 - 23:00

Ce qui est sûr, c'est que cela déforme l'enseignement de ces maîtres, et cela d'ailleurs de manière d'autant plus perverse que c'est subreptice.
Un des quasi postulats des études universitaires dans ces domaines est que pour être "objectif" on est supposé ne pas "croire" en ce qu'on étudie. Cette dissociation entre le savoir et l'être est particulièrement nocive en ce qu'elle bloque les possibilités d'investissement de la connaissance dans la vie intérieure. Elle crée des monstres mégalocéphales au corps grêle. Sans compter le fait qu'on y enseigne comme des vérités établies les hypothèses parfois les plus monstrueuses.

Cela dit, même ce que je viens de dire - et que je considère comme une description édulcorée de la réalité - n'est pas une loi cosmique. Il peut y avoir des cours dispensés par des hommes et des femmes sains d'esprit et de bonne santé morale qui comprenne qu'on ne peut sérieusement enseigner quoi que ce soit sans une empathie avec le sujet. A savoir qu'il n'est peut-être pas indispensable d'y croire, mais que le sérieux méthodologique exige précisément non pas l'objectivité rationnaliste positiviste du 19ème siècle qui transforme toute étude en dissection post-mortem, mais la subjectivité positive vivante qui consiste à enseigner le Maharal comme si on était le Maharal (en toute modestie), tout en "rajoutant les notes de bas de page" pour les remarques d'érudition indispensable.

Ces cours sont généralement donnés par des enseignants qui n'ont pas seulement lu des livres et passé des examens notés par des professeurs, mais qui ont eu la chance, à tel détour de leur itinéraire, de rencontrer un maître. Si vous souhaitez avoir une idée plus précise de quoi je parle, je vous recommande le livre de M. Jacob Gordin, Ecrits, renouveau de la pensée juive en France, Albin Michel, 1995. Vous y trouverez le témoignage de ce que peut la conjonction d'un savoir universitaire à l'érudition impeccable et de la foi la plus brûlante et la moins naïve en la vérité de l'enseignement des Sages d'Israël.