Conversation 5706 - Manitou et les amities judeo-chretiennes

Anonyme
Mercredi 9 avril 2003 - 23:00

shalom, j'aimerai vous poser une question a propos de Manitou.
dans quelques uns de ces ecrits j ai lu qu il attachait bcps d'importance a l amitie judeo-chretienne.
comment cela est il possible sachant tt le mal qu a cause la chretienete au judaisme?

Rav Elyakim Simsovic
Samedi 12 avril 2003 - 23:00

Je ne puis mieux faire que de reproduire ici un extrait de la brochure de Mayanot intitulées "le mythe et le midrash" et dont un chapitre est consacré à ce problème :

d) Amitiés judéo-chrétiennes ?
À un niveau humaniste, comme fait de société, la rencontre d'amitié entre des personnes issues de la tradition juive et des personnes issues de la tradition chrétienne est absolument souhaitable et positive. Elle procède, d'ailleurs, beaucoup plus du caractère des différentes sociétés de par le monde, chacune dans sa nuance et dans son style propre, que de la tradition juive ou de la tradition chrétienne. Ce n’est sans doute pas dans la conscience du Juif comme Juif ou du Chrétien comme Chrétien qu'une révolution s'est produite, mais – en ce qui nous concerne – dans la conscience de leurs intérêts dans la cité française. Il s’agit bien plus, en effet, d’un phénomène de culture française que de culture judéo-chrétienne : pourquoi, s’il en était autrement, avoir attendu deux mille ans ? C'est à un certain moment de l'histoire d'une société donnée que l'événement s’est produit. Bien entendu, lorsqu'un Français est chrétien, le traumatisme de la prise de conscience de ce qui est arrivé au temps du nazisme plonge plus profondément que s'il ne l'est pas. Et lorsque le Juif est interpellé en amitié, lorsqu'il est Juif, cela le touche plus que s'il est simplement ami des Juifs, ami d'un Juif ou ami du Judaïsme.

Pour résumer : amitié entre Juifs et Chrétiens ? Oui. Amitié judéo-chrétienne ? C’est une notion incompréhensible. Les théologies chrétienne et juive conséquentes avec elles-mêmes sont en effet aussi incompatibles entre elles que le mythe et le midrach le sont entre eux.

Ceci, une fois de plus, ne doit pas être entendu au niveau d’une controverse pastorale, paroissiale ou théologique, mais au niveau de l’élucidation d'un concept contemporain qui enferme des ambiguïtés fondamentales. Autant un Chrétien est cohérent en tant que Chrétien et un Juif en tant que Juif, autant il est important et souhaitable qu'ils soient amis au niveau humaniste, à cause de leurs tâches communes de moralité, et en particulier de moralité politique – ce n'est pas un problème d'idées, mais d'engagement – autant, au niveau théologique, ce problème doit être réservé aux spécialistes, les mots ayant leur sens simple. Mais, du côté chrétien en tout cas, rien n'a encore commencé à ce niveau-là. Que les Juifs aient le devoir, en tant que fils aîné de la famille, d'aider les Chrétiens dans ce problème, doit être dit sans ironie, et même sans humour. Parce que c'est sans doute aux Juifs qu'il appartient d'expliquer aux Chrétiens de quoi il a pu s'agir dans cette affaire de famille. Mais ces deux niveaux doivent être distingués absolument.